Adventure is going on ...
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Adventure is going on ...
Rappel du premier message :
Salut à toutes et tous,
Ma nouvelle moto étant fin prête, il est tant de prendre la route.
Surtout que cette année se présentait sous les meilleurs auspices, cinq mois devant moi, quelques économies, une nouvelle moto et des rêves pleins la tête.
La décision a été vite prise, ma prochaine destination sera Magadan avec un détour par l'Iran, les Stans et la Mongolie. Oui, je sais, nombre de frontières sont actuellement toujours fermées pour cause de pandémie mais je reste optimiste sur leur ouverture au printemps.
Tout se préparait au mieux, visa iranien en poche et visa russe multi entré en cours quand la géopolitique et la guerre sont venu rabattre les cartes. Adieu les espoirs d'entrer en Russie …
Je ressort mes cartes, contacte mes amis baroudeurs à la recherche d'informations et voilà que plusieurs options prennent forme. Le terrain de jeu est immense mais le passage des frontières toujours périlleux et conditionné à de multiple facteurs.
Alors que faire ? Reporter sine die ?
Mais l'essentiel est ailleurs, Happiness is a way of travel, not a destination. Ce qui m'anime au plus profond de moi est prendre la route. Alors peu importe les difficultés, c'est décidé je pars. Pour où, bonne question. En quittant la maison, je tourne à gauche et ensuite … je verrais bien. Première destination l'Iran. Ensuite ? J'aviserai … les Stans, le tour de la méditerranée … qui vivra verra.
Vous l'aurez noté, petit changement ce coup-ci. Traditionnellement, je raconte certains de mes voyages à postériori, mais ce coup-ci, cinq mois, c'est long.
Aussi j'ai décidé de céder aux sirènes de FB et d'ouvrir une page pour emmener avec moi ceux que cela intéresse. C'est ici.
L'exercice est nouveau pour moi, donc je ne promets rien. Mon objectif est avant tout de profiter de mon voyage, pas de devenir reporter youtubeur ou autre.
Je ne délaisserai pas le forum pour autant, je viendrais y poser des nouvelles quand je pourrais. Jusqu'à aujourd'hui j'ai résisté aux réseaux sociaux et je comprends que certains soient contre.
Bien entendu, je ferrais un CR en temps et en heure ....
Salut à toutes et tous,
Ma nouvelle moto étant fin prête, il est tant de prendre la route.
Surtout que cette année se présentait sous les meilleurs auspices, cinq mois devant moi, quelques économies, une nouvelle moto et des rêves pleins la tête.
La décision a été vite prise, ma prochaine destination sera Magadan avec un détour par l'Iran, les Stans et la Mongolie. Oui, je sais, nombre de frontières sont actuellement toujours fermées pour cause de pandémie mais je reste optimiste sur leur ouverture au printemps.
Tout se préparait au mieux, visa iranien en poche et visa russe multi entré en cours quand la géopolitique et la guerre sont venu rabattre les cartes. Adieu les espoirs d'entrer en Russie …
Je ressort mes cartes, contacte mes amis baroudeurs à la recherche d'informations et voilà que plusieurs options prennent forme. Le terrain de jeu est immense mais le passage des frontières toujours périlleux et conditionné à de multiple facteurs.
Alors que faire ? Reporter sine die ?
Mais l'essentiel est ailleurs, Happiness is a way of travel, not a destination. Ce qui m'anime au plus profond de moi est prendre la route. Alors peu importe les difficultés, c'est décidé je pars. Pour où, bonne question. En quittant la maison, je tourne à gauche et ensuite … je verrais bien. Première destination l'Iran. Ensuite ? J'aviserai … les Stans, le tour de la méditerranée … qui vivra verra.
Vous l'aurez noté, petit changement ce coup-ci. Traditionnellement, je raconte certains de mes voyages à postériori, mais ce coup-ci, cinq mois, c'est long.
Aussi j'ai décidé de céder aux sirènes de FB et d'ouvrir une page pour emmener avec moi ceux que cela intéresse. C'est ici.
L'exercice est nouveau pour moi, donc je ne promets rien. Mon objectif est avant tout de profiter de mon voyage, pas de devenir reporter youtubeur ou autre.
Je ne délaisserai pas le forum pour autant, je viendrais y poser des nouvelles quand je pourrais. Jusqu'à aujourd'hui j'ai résisté aux réseaux sociaux et je comprends que certains soient contre.
Bien entendu, je ferrais un CR en temps et en heure ....
Jean83 aime ce message
Re: Adventure is going on ...
25 mai, la date de ma dernière publication sur le récit de mon voyage. j'ai été très fainéant !
Alors voici la suite.
Pour rappel, j'étais arrivé à Shiraz en Iran où la soirée à l'hôtel avait été mémorable avec une ambiance de folie à danser sur des chants et musiques traditionnelles.
Après un copieux petit déjeuner avec mes nouvelles amies, Peimane et Nahid, l'heure de la séparation arrive. Elles rentrent à Téhéran. Bonne chance à vous deux et je vous souhaite beaucoup de réussite dans vos projets. Nous resterons en contact grâce à WhatsApp.
Quant à moi, il est l'heure de chausser mes basket et de partir à la découverte de cette ville. Comme à mon habitude, je n'ai rien de vraiment prévu et pars un peu au hasard. Mon hôtel est comme toujours dans la cité historique, alors à peine sorti, me voici dans l'ambiance de la vieille ville.
Je décide de me laisser aller à arpenter les petites rues sans but précis. Nombres de bâtiments sont en piteux états malgré leur intérêt architecturaux indéniables.
Le plan d'urbanisme est typique des villes de pays chauds où tout est fait pour préserver la fraicheur et se protéger de l'ardeur de l'astre solaire.
Constructions en briques et pisé de rigueur même pour les bâtiments plus modernes.
Shiraz est une ville très touristique, et nombre d'anciennes demeures sont transformées en hôtels. Cela a le mérite de préserver une architecture traditionnelle avec à l'étage, des pièces plus aérées pour profiter au maximum du moindre courant d'air.
Rien de très différents des autres villes iraniennes, les bâtisses ne sont pas collées les unes aux autres mais possèdent toutes une ou plusieurs cours intérieures et sont isolées de la rue par des murs d'enceinte dissuasifs.
Autre caractéristique générale des villes iraniennes, les interminables bouchons. Il faut bien garer les voitures et de nombreux parkings gardés fleurissent ici et là mettant à nu une urbanisation sauvage où tout semble bricolé avec les moyens du bord.
Retour à l'ombre des ruelles où parfois une porte laisse entrevoir une demeure de plus grand standing.
Par chance celle-ci se visite et a été transformé en musée. On entre comme toujours dans un patio où la conjugaison de la verdure et des jeux d'eau apporte une véritable sensation de fraicheur, qui par ces température usuelles ici mais caniculaires chez nous, est plus que bienvenue.
J'aime beaucoup cette ambiance très cosie où l'alliance de matériaux naturels tels que les briques cuites à faible températures, bois et mosaïques donnent une atmosphère zen et chaleureuse. Rien n'est dans l'exubérance mais plutôt dans un art de vivre privilégiant le bien être.
La demeure est constituée de plusieurs patios autour desquels sont distribués les pièces à vivre là aussi, climatisées naturellement par l'évaporation de l'eau des bassins.
Température et agréable et noblesse des matériaux, il doit faire bon vivre ici.
Mais il est temp de reprendre mes pérégrinations et à peine dehors la chaleur étouffante est saisissante. Mais les iraniens ont une autre tradition pour se rafraîchir, les bains, très courus vue la file d'attente à l'entrée.
Sur la même place se trouve l'entrée d'une mosquée et du grand bazar …
Où trône cette drôle de sculpture. Un arbre à souhaits ?
Quant au grand bazar, rien vraiment différents de ce que l'on trouve ailleurs …
Non, la vrai particularité de Shiraz est sa citadelle, massive et à la fois étonnante tellement son architecture est épurée, limite design, ce qui est plutôt en adéquation avec son statut de palais fortifié. Comment allier fonctions décoratives et défensives.
Une fois la porte principale franchie, un immense jardin s'offre à nous où il fait bon déambuler loin des brouhahas de l'excitation citadine.
Les pièces sont insérées à même le mur d'enceinte dont l'épaisseur est plus que conséquente.
N'oubliez pas, ici nous sommes en week-end et qui plus est, prolongé et férié avec la fête de la fin de Ramadan. L'affluence touristique est plus que conséquente.
Et comme toujours, des bains où il devait faire bon se prélasser.
La journée touche à sa fin et il est temps de rejoindre l'hôtel. Je reprends mes déambulations erratiques où se mêlent anciennes rues désertes et tranquilles et avenues modernes au niveau sonore assourdissant.
Ce n'est pas parce que ces dames sont voilées qu'elles négligent leur chevelure.
Cette ville est très étonnante, elle me fait penser à un immense patchwork architectural où à chaque changement de direction je découvre une ambiance différente.
Où se superpose à ce méli-mélo architectural une diversité de boutiques étonnantes où se côtoient un magasin de vêtement pour femme des plus rigoriste et une boutique de souvenirs très moderne qui ne dénoterait nullement dans tout lieu touristique occidental.
Enfin, me revoici à l'hôtel où je m'installe dans le patio donnant sur ma chambre pour un repos bien mérité après tant de kilomètres à pieds.
Mais Shiraz recèle un autre trésor, à seulement quelques dizaines de kilomètres : l'antique site de Persépolis, capitale de la Perse antique, construite par Darius Ier vers -500 et détruite par Alexandre le Grand vers - 300.
Prêt pour une visite des lieux ?
Alors en selle. La météo est mitigée, des éclaircies, des coups de vents et de la pluie annoncée pour la fin de journée.
Une fois mon billet acheté au prix "étrangers", les iraniens payants moins cher, la jeune femme de l'accueil à l'anglais impeccable me propose de laisser mon barda de motard dans sa loge, ce que je j'accepte avec plaisir. Je la remercie chaleureusement en la gratifiant de mon plus beau sourire, et c'est avec le casque de l'audio guide sur la tête que je m'approche du site, tout au fond, au pied de la colline.
Le palais est construit sur une immense terrasse où l'on accède par un monumental escalier symétrique dont les marches, légèrement inclinées et de faibles hauteurs, facilitaient l'accès direct aux cavaliers tout en préservant la dignité des dignitaires âgés en leur évitant une trop éprouvante ascension.
Une fois arrivée sur l'esplanade, le visiteur se retrouve nez à nez avec les vestiges de l'antique "Porte de toutes les nations" dont la majesté a pour but essentiel d'assoir la grandeur et la puissance de Darius et de ses successeurs. D'après les archéologues, l'essentiels de tous ces monuments étaient peints couvrant intégralement la pierre.
Il ne s'agissait pas d'une porte à proprement parler, mais plutôt d'une sorte de hall couvert donnant sur "l'Allée des processions" qui guidait le visiteur jusqu'au cœur du palais. Je suis littéralement impressionné par la grandeur et la majesté des édifices, en totale harmonie des constructions antiques, mais en complète contradiction avec les bâtiments de l'ère Sassanide et Abbasside et autre que l'on croise partout ailleurs dans les villes, où le confort et l'art de vie prédomine sur le caractère imposant de l'architecture perse visant à éblouir et intimider les invités.
Mais parallèlement je suis subjugué par cet art si ancien mais au traits tellement épurés et stylisés qu'il pourrait émaner, sans l'ombre d'un doute, de l'œuvre d'un designer moderne. Je n'ai jamais rien vu de tel ni dans l'art Romain, Grec ou Nabatéen.
J'ai du mal à laisser cette statue pour rejoindre le bout de l'allée où se dresse quelques colonnes rescapées délimitant l'Apadana, la salle d'audience de Darius Ier.
Imaginer la hauteur de plafond de cette salle aux dimensions pharaoniques est juste incroyable. Que devaient ressentir les vassaux du rois venant rendre hommage au roi ?
Un peu plus loin sur la gauche apparait le palais des "cent colonnes" qui n'est autre que la salle du trône de Xerxès, fils de Darius Ier qui avait dû trouver inconvenant d'utiliser la même que son père ! Alors, tant qu'à y être, faisons dans la démesure !
Une salle gigantesque soutenues par cents colonnes immenses peintes en noir dont seul les embases ont survécu.
La pièce est encadrées par huit portes monumentales dont les bas-reliefs représentent le roi et différents personnages mythiques accomplissant maints exploits.
Toujours un peu plus loin dans l'allée, la légendaire salle au trésor sur plus de 10 000 m2. D'après les historiens, Alexandre le Grand auraient utilisés 10 000 mulets et 5 000 chameaux pour la vider de toutes ses richesses. Il ne reste aujourd'hui malheureusement plus que les fondations et les bases des colonnes soutenant l'antique édifice. Mais cette salle aux trésor contenait en son sein les archives comptables et administratives du royaumes qui, à la lecture de l'histoire moderne, contenaient quelques perles. En effet, plusieurs siècles avant notre ère et l'avènement de l'islam, les salaires étaient les mêmes pour les femmes et les hommes à poste et qualification égaux et la fonction publique ne semblait pas faire de différence entre les hommes et les femmes, excepté pour quelques aménagements des conditions de travail pour les femmes enceintes prolongés de congés maternités. Mon esprit espiègle ne peut s'empêcher à l'instant de repenser au mollah de Qom qui m'avait fait l'éloge de la civilisation iranienne aussi ancienne que l'humanité. Pourquoi ne pas avoir gardé ce qu'il y avait de meilleur des civilisations précédentes aux lieux d'asservir les femmes ?
En prenant un peu de hauteur, il est plus aisé de se représenté la disposition des lieux.
Mais comme dans toutes capitales antiques, les membres de l'aristocratie et de la dynastie royale se devaient d'avoir des tombes à leur démesure. Elles ont été creusé à même la montagne.
Une photo pour la postérité ? Une fois encore, les iraniennes ne sont pas toutes égales devant les préceptes religieux.
Une fois arrivé en haut, la sobriété des tombes est presque étonnante vu la magnificence du reste de l'architecture.
Ces tombeaux, creusés et sculptés à même la falaise me font penser à ceux de Pétra en Jordanie, visité il y a de cela une vingtaine d'année.
Mais le vent se lève et le ciel se noirci dangereusement. Je ne tarde pas plus longtemps sur ce site unique et si détonnant dans ce pays. C'est une civilisation dont j'avais bien évidement entendu parler mais dont je ne savais rien. Je suis ravi de cette découverte, entre antiquité et modernité, qui restera pour sûr un des grands moments de mon voyage.
Cela fait deux jours que je suis à Shiraz, je n'ai certes pas tout vu, mais j'ai déjà la bougeotte. Demain je reprends la route pour Eghlid.
A suivre ...
Alors voici la suite.
Pour rappel, j'étais arrivé à Shiraz en Iran où la soirée à l'hôtel avait été mémorable avec une ambiance de folie à danser sur des chants et musiques traditionnelles.
Après un copieux petit déjeuner avec mes nouvelles amies, Peimane et Nahid, l'heure de la séparation arrive. Elles rentrent à Téhéran. Bonne chance à vous deux et je vous souhaite beaucoup de réussite dans vos projets. Nous resterons en contact grâce à WhatsApp.
Quant à moi, il est l'heure de chausser mes basket et de partir à la découverte de cette ville. Comme à mon habitude, je n'ai rien de vraiment prévu et pars un peu au hasard. Mon hôtel est comme toujours dans la cité historique, alors à peine sorti, me voici dans l'ambiance de la vieille ville.
Je décide de me laisser aller à arpenter les petites rues sans but précis. Nombres de bâtiments sont en piteux états malgré leur intérêt architecturaux indéniables.
Le plan d'urbanisme est typique des villes de pays chauds où tout est fait pour préserver la fraicheur et se protéger de l'ardeur de l'astre solaire.
Constructions en briques et pisé de rigueur même pour les bâtiments plus modernes.
Shiraz est une ville très touristique, et nombre d'anciennes demeures sont transformées en hôtels. Cela a le mérite de préserver une architecture traditionnelle avec à l'étage, des pièces plus aérées pour profiter au maximum du moindre courant d'air.
Rien de très différents des autres villes iraniennes, les bâtisses ne sont pas collées les unes aux autres mais possèdent toutes une ou plusieurs cours intérieures et sont isolées de la rue par des murs d'enceinte dissuasifs.
Autre caractéristique générale des villes iraniennes, les interminables bouchons. Il faut bien garer les voitures et de nombreux parkings gardés fleurissent ici et là mettant à nu une urbanisation sauvage où tout semble bricolé avec les moyens du bord.
Retour à l'ombre des ruelles où parfois une porte laisse entrevoir une demeure de plus grand standing.
Par chance celle-ci se visite et a été transformé en musée. On entre comme toujours dans un patio où la conjugaison de la verdure et des jeux d'eau apporte une véritable sensation de fraicheur, qui par ces température usuelles ici mais caniculaires chez nous, est plus que bienvenue.
J'aime beaucoup cette ambiance très cosie où l'alliance de matériaux naturels tels que les briques cuites à faible températures, bois et mosaïques donnent une atmosphère zen et chaleureuse. Rien n'est dans l'exubérance mais plutôt dans un art de vivre privilégiant le bien être.
La demeure est constituée de plusieurs patios autour desquels sont distribués les pièces à vivre là aussi, climatisées naturellement par l'évaporation de l'eau des bassins.
Température et agréable et noblesse des matériaux, il doit faire bon vivre ici.
Mais il est temp de reprendre mes pérégrinations et à peine dehors la chaleur étouffante est saisissante. Mais les iraniens ont une autre tradition pour se rafraîchir, les bains, très courus vue la file d'attente à l'entrée.
Sur la même place se trouve l'entrée d'une mosquée et du grand bazar …
Où trône cette drôle de sculpture. Un arbre à souhaits ?
Quant au grand bazar, rien vraiment différents de ce que l'on trouve ailleurs …
Non, la vrai particularité de Shiraz est sa citadelle, massive et à la fois étonnante tellement son architecture est épurée, limite design, ce qui est plutôt en adéquation avec son statut de palais fortifié. Comment allier fonctions décoratives et défensives.
Une fois la porte principale franchie, un immense jardin s'offre à nous où il fait bon déambuler loin des brouhahas de l'excitation citadine.
Les pièces sont insérées à même le mur d'enceinte dont l'épaisseur est plus que conséquente.
N'oubliez pas, ici nous sommes en week-end et qui plus est, prolongé et férié avec la fête de la fin de Ramadan. L'affluence touristique est plus que conséquente.
Et comme toujours, des bains où il devait faire bon se prélasser.
La journée touche à sa fin et il est temps de rejoindre l'hôtel. Je reprends mes déambulations erratiques où se mêlent anciennes rues désertes et tranquilles et avenues modernes au niveau sonore assourdissant.
Ce n'est pas parce que ces dames sont voilées qu'elles négligent leur chevelure.
Cette ville est très étonnante, elle me fait penser à un immense patchwork architectural où à chaque changement de direction je découvre une ambiance différente.
Où se superpose à ce méli-mélo architectural une diversité de boutiques étonnantes où se côtoient un magasin de vêtement pour femme des plus rigoriste et une boutique de souvenirs très moderne qui ne dénoterait nullement dans tout lieu touristique occidental.
Enfin, me revoici à l'hôtel où je m'installe dans le patio donnant sur ma chambre pour un repos bien mérité après tant de kilomètres à pieds.
Mais Shiraz recèle un autre trésor, à seulement quelques dizaines de kilomètres : l'antique site de Persépolis, capitale de la Perse antique, construite par Darius Ier vers -500 et détruite par Alexandre le Grand vers - 300.
Prêt pour une visite des lieux ?
Alors en selle. La météo est mitigée, des éclaircies, des coups de vents et de la pluie annoncée pour la fin de journée.
Une fois mon billet acheté au prix "étrangers", les iraniens payants moins cher, la jeune femme de l'accueil à l'anglais impeccable me propose de laisser mon barda de motard dans sa loge, ce que je j'accepte avec plaisir. Je la remercie chaleureusement en la gratifiant de mon plus beau sourire, et c'est avec le casque de l'audio guide sur la tête que je m'approche du site, tout au fond, au pied de la colline.
Le palais est construit sur une immense terrasse où l'on accède par un monumental escalier symétrique dont les marches, légèrement inclinées et de faibles hauteurs, facilitaient l'accès direct aux cavaliers tout en préservant la dignité des dignitaires âgés en leur évitant une trop éprouvante ascension.
Une fois arrivée sur l'esplanade, le visiteur se retrouve nez à nez avec les vestiges de l'antique "Porte de toutes les nations" dont la majesté a pour but essentiel d'assoir la grandeur et la puissance de Darius et de ses successeurs. D'après les archéologues, l'essentiels de tous ces monuments étaient peints couvrant intégralement la pierre.
Il ne s'agissait pas d'une porte à proprement parler, mais plutôt d'une sorte de hall couvert donnant sur "l'Allée des processions" qui guidait le visiteur jusqu'au cœur du palais. Je suis littéralement impressionné par la grandeur et la majesté des édifices, en totale harmonie des constructions antiques, mais en complète contradiction avec les bâtiments de l'ère Sassanide et Abbasside et autre que l'on croise partout ailleurs dans les villes, où le confort et l'art de vie prédomine sur le caractère imposant de l'architecture perse visant à éblouir et intimider les invités.
Mais parallèlement je suis subjugué par cet art si ancien mais au traits tellement épurés et stylisés qu'il pourrait émaner, sans l'ombre d'un doute, de l'œuvre d'un designer moderne. Je n'ai jamais rien vu de tel ni dans l'art Romain, Grec ou Nabatéen.
J'ai du mal à laisser cette statue pour rejoindre le bout de l'allée où se dresse quelques colonnes rescapées délimitant l'Apadana, la salle d'audience de Darius Ier.
Imaginer la hauteur de plafond de cette salle aux dimensions pharaoniques est juste incroyable. Que devaient ressentir les vassaux du rois venant rendre hommage au roi ?
Un peu plus loin sur la gauche apparait le palais des "cent colonnes" qui n'est autre que la salle du trône de Xerxès, fils de Darius Ier qui avait dû trouver inconvenant d'utiliser la même que son père ! Alors, tant qu'à y être, faisons dans la démesure !
Une salle gigantesque soutenues par cents colonnes immenses peintes en noir dont seul les embases ont survécu.
La pièce est encadrées par huit portes monumentales dont les bas-reliefs représentent le roi et différents personnages mythiques accomplissant maints exploits.
Toujours un peu plus loin dans l'allée, la légendaire salle au trésor sur plus de 10 000 m2. D'après les historiens, Alexandre le Grand auraient utilisés 10 000 mulets et 5 000 chameaux pour la vider de toutes ses richesses. Il ne reste aujourd'hui malheureusement plus que les fondations et les bases des colonnes soutenant l'antique édifice. Mais cette salle aux trésor contenait en son sein les archives comptables et administratives du royaumes qui, à la lecture de l'histoire moderne, contenaient quelques perles. En effet, plusieurs siècles avant notre ère et l'avènement de l'islam, les salaires étaient les mêmes pour les femmes et les hommes à poste et qualification égaux et la fonction publique ne semblait pas faire de différence entre les hommes et les femmes, excepté pour quelques aménagements des conditions de travail pour les femmes enceintes prolongés de congés maternités. Mon esprit espiègle ne peut s'empêcher à l'instant de repenser au mollah de Qom qui m'avait fait l'éloge de la civilisation iranienne aussi ancienne que l'humanité. Pourquoi ne pas avoir gardé ce qu'il y avait de meilleur des civilisations précédentes aux lieux d'asservir les femmes ?
En prenant un peu de hauteur, il est plus aisé de se représenté la disposition des lieux.
Mais comme dans toutes capitales antiques, les membres de l'aristocratie et de la dynastie royale se devaient d'avoir des tombes à leur démesure. Elles ont été creusé à même la montagne.
Une photo pour la postérité ? Une fois encore, les iraniennes ne sont pas toutes égales devant les préceptes religieux.
Une fois arrivé en haut, la sobriété des tombes est presque étonnante vu la magnificence du reste de l'architecture.
Ces tombeaux, creusés et sculptés à même la falaise me font penser à ceux de Pétra en Jordanie, visité il y a de cela une vingtaine d'année.
Mais le vent se lève et le ciel se noirci dangereusement. Je ne tarde pas plus longtemps sur ce site unique et si détonnant dans ce pays. C'est une civilisation dont j'avais bien évidement entendu parler mais dont je ne savais rien. Je suis ravi de cette découverte, entre antiquité et modernité, qui restera pour sûr un des grands moments de mon voyage.
Cela fait deux jours que je suis à Shiraz, je n'ai certes pas tout vu, mais j'ai déjà la bougeotte. Demain je reprends la route pour Eghlid.
A suivre ...
L73 aime ce message
Re: Adventure is going on ...
Réveillé tôt mais départ tardif ce matin. Pour une fois, ce n'est pas que j'ai trainé comme à mon habitude, juste que la météo est des plus capricieuse et qu'éclaircies et averses jouent au chat et à la souris. Rouler sous la pluie est une chose, charger la moto sous un déluge en est une autre.
Enfin une éclaircie, alors c'est parti, je me lance.
La route est rapidement monotone. Je m'occupe comme je peux en profitant des incongruités de la nature résultant de la mise en place des massifs rocheux.
Parfois un village me sort de ma torpeur. J'apprécie tout particulièrement le mélange des genres, entre le talent des grapheurs, l'architecture de bric et de broc et la modernité des panneaux photovoltaïques.
Enfin je prends un peu d'altitude et les quelques virages qui se profilent me rendent le sourire.
Plaisir éphémère …
Alors quand je la vois, là, face à moi, offerte de la sorte, promesse de maints plaisirs, je ne peux résister et m'y engouffre avec délectation …
Elle n'apparait pas sur la cartographie de mon GPS mais peu importe, elle fonce droit dans la montagne. Je navigue à vue, vérifiant juste sur Osmand que j'évolue globalement dans le bonne direction. Les premières bifurcations arrivent … droite ou gauche, peu importe ce coup-ci.
Cela fait maintenant un bon bout de temps que je n'ai pas vu de goudron, toujours dans un no mans land cartographique et la situation se corse. La météo prend un air courroucé et la piste devant moi exhibe les stigmates de circulation difficile en cas de boue. Voilà que maintenant, en plus du cap à suivre, il va me falloir prendre en compte la présence éventuelle de bourbiers.
Mais je ne suis pas perdu, je croise encore quelques rares villages.
J'aperçois au loin des campements d'éleveurs nomades sur fond de ciel désespérément gris. La curiosité est la plus forte, je garde le cap même si sur mon GPS je ne vois toujours pas une seule échappatoire.
Qui dit campement d'éleveurs, dit inéluctablement troupeaux que je ne tarde pas à croiser …
Et malheureusement chiens de bergers qui doivent me confondre avec un prédateur vu leur propension à se jeter à mes trousses. A chaque campement j'anticipe, j'essaie de visualiser la piste et ses pièges, tombe un rapport et met gros gaz en restant concentré au mieux sur la conduite.
C'est qu'ils sont de taille impressionnante et que certains sont très agressifs. Je ne sais pas s'ils sont dans l'intimidation ou s'ils iraient jusqu'à m'attaquer, mais certains étaient vraiment très proche et j'en suis venu à espérer que les protections de mes bottes résistent à leur morsure le cas échéant. Cela me ramène de nombreuses années en arrière lorsque avec ma R100 GS j'avais été pris en chasse par une meute de chiens errants en traversant l'Anatolie. Une des rare fois où je me suis senti réellement en danger lors de mes voyages.
Une fois loin de tout dangers, je me pose et fait un point sur la navigation. Je vois tout au loin ce que j'imagine être la route qu'il me faudrait rejoindre ce que me confirme Osmand. Mais les traces que je suis en train de suivre s'en éloignent inexorablement pour s'enfoncer dans la montagne et, pour mal faire, la couleur du ciel ne laisse peu d'option sur l'évolution de la météo. Je suis face à un choix. Premièrement faire demi-tour jusqu'au bitume, j'ai assez d'essence pour cela, mais cela doit faire plus de deux heures que je l'ai quitté et cela supposerait retraverser les campements nomades et leur hordes de chiens aux aboiements peu amicaux. Ou alors quitter la trace et tirer tout droit jusqu'à la route en total hors-piste.
Je pèse le pour et le contre … et décide de tirer tout droit. Osmand me dit qu'il n'y a que quelques kilomètres et le sol me ne semble pas trop accidenté est assez porteur … tant qu'il n'est pas détrempé. Parfois la roue arrière s'enfonce légèrement, le moteur force, je garde les gaz pour ne pas rester planté. La PR7 reste imperturbable et tracte sans faillir me sortant de ces mauvais pas.
Je ne suis pas le seul à rouler de la sorte dans la pampa. Parfois je croise des traces et forcément m'arrête pour faire un point de navigation. Continuer tout droit ou les suivre ? Oui, mais dans quel sens alors ?
Je continu tout droit jusqu'à ce que je tombe sur un fossé trop dangereux vu mon niveau technique et, qui plus est, je suis seul au milieu de nulle part. Mais là route n'est plus très loin, juste derrière les lignes électriques !
Alors je jardine un peu pour contourner l'obstacle jusqu'à trouver une ouverture. Enfin je retrouve une piste et la route est là !
Il me reste néanmoins plusieurs dizaines de kilomètres à faire et si jusqu'à présent je n'avais eu qu'à déplorer quelques gouttes, je ne penses pas échapper à la saucée plus longtemps. Je ferme les écoutilles de ma veste, serre les fesses, baisse ma visière et j'y vais, résigné.
Enfin Eghlid où je trouve une guesthouse des plus accueillante.
Mon hôte me propose de reposer un peu avant de m'installer et m'offre du thé avec leur délicieux bâtons de sucre caramélisé.
Une journée somme toute banale, sans rien d'extraordinaire à vraiment raconter, mais c'est aussi souvent cela le voyage. Juste un bon moment de moto où j'ai pris beaucoup de plaisir à rouler.
Au final j'aurais parcourus plus ou moins 250 km depuis Shiraz. L'Iran à cela d'intéressant, c'est que l'on peut adapter ses trajets à ses envies à sa moto. Ici, j'aurais pu décider de prendre la quatre voies tout à l'Est ou la petite route plus au centre. j'ai finalement opté pour un mix route et piste plus cours en kilomètres mais pas du tout en temps de trajet !
Demain, je vise la ville de Yazd aux portes du désert. Pour se faire, sur la vue satellite d'Osmand, j'ai déjà repéré quelques pistes qui semblent des plus prometteuses.
Mais d'ici là, une bonne nuit de sommeil s'impose.
Enfin une éclaircie, alors c'est parti, je me lance.
La route est rapidement monotone. Je m'occupe comme je peux en profitant des incongruités de la nature résultant de la mise en place des massifs rocheux.
Parfois un village me sort de ma torpeur. J'apprécie tout particulièrement le mélange des genres, entre le talent des grapheurs, l'architecture de bric et de broc et la modernité des panneaux photovoltaïques.
Enfin je prends un peu d'altitude et les quelques virages qui se profilent me rendent le sourire.
Plaisir éphémère …
Alors quand je la vois, là, face à moi, offerte de la sorte, promesse de maints plaisirs, je ne peux résister et m'y engouffre avec délectation …
Elle n'apparait pas sur la cartographie de mon GPS mais peu importe, elle fonce droit dans la montagne. Je navigue à vue, vérifiant juste sur Osmand que j'évolue globalement dans le bonne direction. Les premières bifurcations arrivent … droite ou gauche, peu importe ce coup-ci.
Cela fait maintenant un bon bout de temps que je n'ai pas vu de goudron, toujours dans un no mans land cartographique et la situation se corse. La météo prend un air courroucé et la piste devant moi exhibe les stigmates de circulation difficile en cas de boue. Voilà que maintenant, en plus du cap à suivre, il va me falloir prendre en compte la présence éventuelle de bourbiers.
Mais je ne suis pas perdu, je croise encore quelques rares villages.
J'aperçois au loin des campements d'éleveurs nomades sur fond de ciel désespérément gris. La curiosité est la plus forte, je garde le cap même si sur mon GPS je ne vois toujours pas une seule échappatoire.
Qui dit campement d'éleveurs, dit inéluctablement troupeaux que je ne tarde pas à croiser …
Et malheureusement chiens de bergers qui doivent me confondre avec un prédateur vu leur propension à se jeter à mes trousses. A chaque campement j'anticipe, j'essaie de visualiser la piste et ses pièges, tombe un rapport et met gros gaz en restant concentré au mieux sur la conduite.
C'est qu'ils sont de taille impressionnante et que certains sont très agressifs. Je ne sais pas s'ils sont dans l'intimidation ou s'ils iraient jusqu'à m'attaquer, mais certains étaient vraiment très proche et j'en suis venu à espérer que les protections de mes bottes résistent à leur morsure le cas échéant. Cela me ramène de nombreuses années en arrière lorsque avec ma R100 GS j'avais été pris en chasse par une meute de chiens errants en traversant l'Anatolie. Une des rare fois où je me suis senti réellement en danger lors de mes voyages.
Une fois loin de tout dangers, je me pose et fait un point sur la navigation. Je vois tout au loin ce que j'imagine être la route qu'il me faudrait rejoindre ce que me confirme Osmand. Mais les traces que je suis en train de suivre s'en éloignent inexorablement pour s'enfoncer dans la montagne et, pour mal faire, la couleur du ciel ne laisse peu d'option sur l'évolution de la météo. Je suis face à un choix. Premièrement faire demi-tour jusqu'au bitume, j'ai assez d'essence pour cela, mais cela doit faire plus de deux heures que je l'ai quitté et cela supposerait retraverser les campements nomades et leur hordes de chiens aux aboiements peu amicaux. Ou alors quitter la trace et tirer tout droit jusqu'à la route en total hors-piste.
Je pèse le pour et le contre … et décide de tirer tout droit. Osmand me dit qu'il n'y a que quelques kilomètres et le sol me ne semble pas trop accidenté est assez porteur … tant qu'il n'est pas détrempé. Parfois la roue arrière s'enfonce légèrement, le moteur force, je garde les gaz pour ne pas rester planté. La PR7 reste imperturbable et tracte sans faillir me sortant de ces mauvais pas.
Je ne suis pas le seul à rouler de la sorte dans la pampa. Parfois je croise des traces et forcément m'arrête pour faire un point de navigation. Continuer tout droit ou les suivre ? Oui, mais dans quel sens alors ?
Je continu tout droit jusqu'à ce que je tombe sur un fossé trop dangereux vu mon niveau technique et, qui plus est, je suis seul au milieu de nulle part. Mais là route n'est plus très loin, juste derrière les lignes électriques !
Alors je jardine un peu pour contourner l'obstacle jusqu'à trouver une ouverture. Enfin je retrouve une piste et la route est là !
Il me reste néanmoins plusieurs dizaines de kilomètres à faire et si jusqu'à présent je n'avais eu qu'à déplorer quelques gouttes, je ne penses pas échapper à la saucée plus longtemps. Je ferme les écoutilles de ma veste, serre les fesses, baisse ma visière et j'y vais, résigné.
Enfin Eghlid où je trouve une guesthouse des plus accueillante.
Mon hôte me propose de reposer un peu avant de m'installer et m'offre du thé avec leur délicieux bâtons de sucre caramélisé.
Une journée somme toute banale, sans rien d'extraordinaire à vraiment raconter, mais c'est aussi souvent cela le voyage. Juste un bon moment de moto où j'ai pris beaucoup de plaisir à rouler.
Au final j'aurais parcourus plus ou moins 250 km depuis Shiraz. L'Iran à cela d'intéressant, c'est que l'on peut adapter ses trajets à ses envies à sa moto. Ici, j'aurais pu décider de prendre la quatre voies tout à l'Est ou la petite route plus au centre. j'ai finalement opté pour un mix route et piste plus cours en kilomètres mais pas du tout en temps de trajet !
Demain, je vise la ville de Yazd aux portes du désert. Pour se faire, sur la vue satellite d'Osmand, j'ai déjà repéré quelques pistes qui semblent des plus prometteuses.
Mais d'ici là, une bonne nuit de sommeil s'impose.
Hugo99 et L73 aiment ce message
Re: Adventure is going on ...
Les portes du désert …
Enfin, ça c'est la promesse.
Objectif du jour, atteindre Yazd, à un peu moins de 300 km de là.
De ce que je sais de cette ville, c'est qu'elle dégage un air de Sahel et, inexorablement, me renvoie à mes aventures africaines et la découverte de Tombouctou. Autant dire que déjà j'en salive d'envie !
Si la navigation d'hier et la partie off road avait largement été improvisée, aujourd'hui, il n'en ait rien. Effectivement, cela fait déjà quelques temps que, sur la vue satellite dOsmand, j'ai repéré une piste en plein désert qui semble serpenter entre des massifs montagneux. Elle n'apparait pas sur la cartographie OSM mais est bien visible sur la vue satellite et devrait être facile à suivre. C'est pour moi un critère essentiel car comme dirait, mon sens de l'orientation est tout sauf inné ! J'ai donc préparé avec minutie la navigation du jour, placé une marque là où je devrais quitter la route ainsi que quelques autres repères aux différents embranchements.
Mais avant cette piste mystère, j'ai prévu d'en prendre une autre, elle, bien référencée sur Osmand. Elle semble suffisamment grosse et roulante pour me permettre d'avancer à un bon rythme avant d'attaquer les choses sérieuses. Qui dit désert, dit quelques précautions d'usages, prévoir les ravitaillements d'essence, faire le plein d'eau et réaliser un check up visuel rapide de la moto. J'en profite aussi pour nettoyer le filtre à air de la PR7.
Ma relation avec les déserts a toujours été compliquée. Si je devais la mettre en musique, ce serait je t'aime moi non plus, particulièrement en moto.
Je n'aime pas rouler dans le sable, y ai parfois du mal à supporter les très fortes chaleurs, redoute les tempêtes, mais allez savoir pourquoi, dès qu'il y en a un qui pointe le nez, je ne peux m'empêcher d'y foncer. Que ce soit le Sahara, le Wadi Rum ou le désert de cendre volcanique en Islande, ils ont tous leur charme intrinsèque et ont leur propre recette pour vous envouter, si bien, qu'au final, tel de puissants électroaimants, ils m'attirent irrémédiablement.
Alors oui, je sais que le véritable désert iranien, le Luth, n'est pas encore là, mais quand même, cette simple évocation m'émoustille déjà au plus haut point.
Trêve de bavardages, je vais pour charger la moto, mais une fois encore, une averse repousse le départ. Il faut dire que depuis quelques jours il est rare que la pluie ne s'invite pas au menus et cette nuit n'y a pas fait exception. De violents orages et des trombes d'eau ce sont abattues en un boucan d'enfer sur le toit en tôle ondulé de la guesthouse.
Enfin, je prends la route. Je ne suis pas encore sorti du village que je croise un ruisseau charriant tout un tas de détritus plastiques. Une fois de plus je ne peux que me désoler de voir comment notre mode de vie occidental impacte négativement le reste du monde.
A peine sorti du village que je me retrouve sur une piste, à mon plus grand étonnement. D'après la cartographie d'Osmand, je suis sur une route bitumée. Ne jamais oublier qu'aussi perfectionnés qu'ils soient, tous nos systèmes életronumériques ne sont que des aides à la navigation. Cela ne me surprends en rien mais, à l'instant, je ne peux que constater les effets de la météo nocturne. J'espère simplement qu'il n'y aura pas trop de bourbiers, car non seulement je ne suis pas un grand fan, mais ma monte pneumatique n'est pas vraiment adaptée.
Après un épisode d'asphalte sans intérêt autre que celui d'avaler des kilomètres facilement, voici la bifurcation vers la première piste.
Effectivement elle est bien délimitée mais me laisse une impression mitigée. Partout une sorte d'argile, présentant ici des craquelures, stigmates de sècheresses passées, et là, des traces d'humidité.
Rapidement tous mes sens sont aux aguets. Les traces d'embourbement peu profondes me font redouter cette glaise traitresse que l'on retrouve en autre dans le nord de l'Espagne, où les moindres traces d'humidité la transforme en patinoire. Oui, en moto, je suis d'un naturel trouillard, réalité que j'essaie maladroitement de cacher sous le vocable de prudence.
Mes craintes semblent rapidement infondées et la belle piste à la visibilité dégagée incite à mettre gros gaz pour se faire plaisir, surtout que cette espiègle de PR7 n'attend que cela. Mais comme toujours, gare à l'excès d'optimisme, les pièges sont toujours là, prêt à envoyer pilote et machine au tapis au risque de sonner la glas du voyage. Dans ce genre de situation, je suis très fréquemment titillé entre raison et pulsion, et, comme bien souvent, c'est la première frayeur qui vient doucher mes velléités d'apprenti pilote.
Je finis par récupérer le goudron. Là aussi les effets des dernières pluies sont partout présents. L'Iran présente ce contraste étonnant où, très souvent, se côtoient les traces de sécheresses prolongées et de terrain désertiques avec les manifestations d'évènements pluvieux et hydriques de fortes ampleurs capable de tout balayer sur leur passages.
Je continue ma progression où je croise régulièrement des bâtisses isolées au milieu de nulle part et semblant abandonnées. Leur construction récente semble démentir cette hypothèse, mais je serais curieux de connaitre leur utilité.
Paradoxalement, alors que le navigation est des plus simple ici, je jardine un peu ratant systématiquement les embranchements. Je devrais rêvasser un peu moins et être plus concentré ! Mais je ne suis pas perdu, je traverse encore plusieurs gros villages au mélange de constructions en parpaings et en brique et pisé.
Les affres climatiques sur ce genre de construction sont partout visibles, impossible à réparer et entretenir, obligeant les habitants à abandonner leur logement au bout de quelques dizaines d'années et de reconstruire un peu plus loin.
C'est exactement la même chose en Afrique noire comme au Mali où je me rappelle très bien, dans la région de Sikasso, où l'on nous avait vanté les mérites de la curiosité locale, les tatas, anciennes fortifications et fierté locale. Une fois sur place, profondément déçu de ce que nous visitions, nous les avions qualifié peu diplomatiquement de "tata de boue", ce qui, à juste titre, avait profondément heurté la susceptibilité de nos hôtes !
Plus loin sur la route, j'arrive à un caravansérail que j'avais repéré sur Osmand. Il y en a pas mal ici comme partout sur la route de la soie.
De bonne dimension et plutôt bien conservé, une petite visite s'impose.
A l'intérieur, une vaste cour délimitée par le mur d'enceinte et des bâtiments.
Ce type d'architecture est caractéristique des pays désertiques où le bois fait cruellement défaut. Point de charpente, juste des constructions en voute édifiées avec des briques et crépies au pisé. Ce matériaux très friable a de nombreuses caractéristiques intéressantes, notamment thermiques, mais résiste malheureusement très mal au temps qui passe. Je ne peux m'empêcher d'essayer d'imaginer la vie qui devait y régner, où hommes et bêtes de somme devaient cohabiter tant bien que mal.
L'heure tourne et je suis impatient de reprendre la route, surtout que la piste traversant le désert n'est pas loin. Autant dire que je ne fais pas de vieux os ici et que c'est tout excité que je remonte sur ma moto. Je bascule la vue de navigation en mode satellite et gaz.
Mais elle est où ma petite piste perdue dans le désert ?
Plusieurs fois je vérifie sur ma tablette, pas de doutes, elle est censée être là.
Déception.
A la place il n'y a qu'une autoroute sans véritable intérêt qui fonce droit dans la montagne.
Je comprends vite. C'est une piste tracée uniquement pour la construction de la ligne électrique qui la borde. Ce n'est pas la première fois que j'en emprunte. Sur le même principe, j'ai plusieurs fois suivi des pistes crées récemment pour l'édification d'éoliennes en Espagne qui, bien souvent, offrent l'avantage de serpenter sur les lignes de crête offrant alors un point de vue remarquable.
Cruelle déception.
Le désert tant attendu, tel l'Arlésienne, se fait désirer et ne sera pas encore pour aujourd'hui. Contre mauvaise fortune bon cœur dit le proverbe.
Ainsi va la vie.
J'oublie vite cette déconvenue et profite de ce qui s'offre à moi, une piste brute, à peine travaillée et épousant les reliefs de la montagne.
S'en suit alors une séance de montagnes russes ou grimpettes sévères et descentes du même acabit s'enchainent dans un décors aux couleurs changeantes au gré de la nature des sols traversés. Une fois encore la PR7 fait merveille tractant sans relâche même lorsque le sol a une portance plus que limité.
Une fois encore, j'évite de me laisser griser et reste sur mes gardes sans pouvoir cacher mon plaisir de rouler. La navigation que je pensais délicate est en réalité enfantine avec cette immense saignée inratable. Décidément, aujourd'hui, j'aurais eu tout faux !
La fin de l'après-midi approche et avec elle, le bitume.
Je rebascule Osmand en mode navigation et m'élance pour les 35 derniers kilomètres me séparant de la ville des portes du désert célèbre pour ses tours de vent.
Mon ami, guide touristique rencontré à Trabiz, m'ayant recommandé un hôtel dans la vieille ville, je n'aurais pas à galérer pour trouver un logement.
Demain ce sera journée off, je troquerai ma moto pour mes baskets pour la visite de la ville.
Enfin, ça c'est la promesse.
Objectif du jour, atteindre Yazd, à un peu moins de 300 km de là.
De ce que je sais de cette ville, c'est qu'elle dégage un air de Sahel et, inexorablement, me renvoie à mes aventures africaines et la découverte de Tombouctou. Autant dire que déjà j'en salive d'envie !
Si la navigation d'hier et la partie off road avait largement été improvisée, aujourd'hui, il n'en ait rien. Effectivement, cela fait déjà quelques temps que, sur la vue satellite dOsmand, j'ai repéré une piste en plein désert qui semble serpenter entre des massifs montagneux. Elle n'apparait pas sur la cartographie OSM mais est bien visible sur la vue satellite et devrait être facile à suivre. C'est pour moi un critère essentiel car comme dirait, mon sens de l'orientation est tout sauf inné ! J'ai donc préparé avec minutie la navigation du jour, placé une marque là où je devrais quitter la route ainsi que quelques autres repères aux différents embranchements.
Mais avant cette piste mystère, j'ai prévu d'en prendre une autre, elle, bien référencée sur Osmand. Elle semble suffisamment grosse et roulante pour me permettre d'avancer à un bon rythme avant d'attaquer les choses sérieuses. Qui dit désert, dit quelques précautions d'usages, prévoir les ravitaillements d'essence, faire le plein d'eau et réaliser un check up visuel rapide de la moto. J'en profite aussi pour nettoyer le filtre à air de la PR7.
Ma relation avec les déserts a toujours été compliquée. Si je devais la mettre en musique, ce serait je t'aime moi non plus, particulièrement en moto.
Je n'aime pas rouler dans le sable, y ai parfois du mal à supporter les très fortes chaleurs, redoute les tempêtes, mais allez savoir pourquoi, dès qu'il y en a un qui pointe le nez, je ne peux m'empêcher d'y foncer. Que ce soit le Sahara, le Wadi Rum ou le désert de cendre volcanique en Islande, ils ont tous leur charme intrinsèque et ont leur propre recette pour vous envouter, si bien, qu'au final, tel de puissants électroaimants, ils m'attirent irrémédiablement.
Alors oui, je sais que le véritable désert iranien, le Luth, n'est pas encore là, mais quand même, cette simple évocation m'émoustille déjà au plus haut point.
Trêve de bavardages, je vais pour charger la moto, mais une fois encore, une averse repousse le départ. Il faut dire que depuis quelques jours il est rare que la pluie ne s'invite pas au menus et cette nuit n'y a pas fait exception. De violents orages et des trombes d'eau ce sont abattues en un boucan d'enfer sur le toit en tôle ondulé de la guesthouse.
Enfin, je prends la route. Je ne suis pas encore sorti du village que je croise un ruisseau charriant tout un tas de détritus plastiques. Une fois de plus je ne peux que me désoler de voir comment notre mode de vie occidental impacte négativement le reste du monde.
A peine sorti du village que je me retrouve sur une piste, à mon plus grand étonnement. D'après la cartographie d'Osmand, je suis sur une route bitumée. Ne jamais oublier qu'aussi perfectionnés qu'ils soient, tous nos systèmes életronumériques ne sont que des aides à la navigation. Cela ne me surprends en rien mais, à l'instant, je ne peux que constater les effets de la météo nocturne. J'espère simplement qu'il n'y aura pas trop de bourbiers, car non seulement je ne suis pas un grand fan, mais ma monte pneumatique n'est pas vraiment adaptée.
Après un épisode d'asphalte sans intérêt autre que celui d'avaler des kilomètres facilement, voici la bifurcation vers la première piste.
Effectivement elle est bien délimitée mais me laisse une impression mitigée. Partout une sorte d'argile, présentant ici des craquelures, stigmates de sècheresses passées, et là, des traces d'humidité.
Rapidement tous mes sens sont aux aguets. Les traces d'embourbement peu profondes me font redouter cette glaise traitresse que l'on retrouve en autre dans le nord de l'Espagne, où les moindres traces d'humidité la transforme en patinoire. Oui, en moto, je suis d'un naturel trouillard, réalité que j'essaie maladroitement de cacher sous le vocable de prudence.
Mes craintes semblent rapidement infondées et la belle piste à la visibilité dégagée incite à mettre gros gaz pour se faire plaisir, surtout que cette espiègle de PR7 n'attend que cela. Mais comme toujours, gare à l'excès d'optimisme, les pièges sont toujours là, prêt à envoyer pilote et machine au tapis au risque de sonner la glas du voyage. Dans ce genre de situation, je suis très fréquemment titillé entre raison et pulsion, et, comme bien souvent, c'est la première frayeur qui vient doucher mes velléités d'apprenti pilote.
Je finis par récupérer le goudron. Là aussi les effets des dernières pluies sont partout présents. L'Iran présente ce contraste étonnant où, très souvent, se côtoient les traces de sécheresses prolongées et de terrain désertiques avec les manifestations d'évènements pluvieux et hydriques de fortes ampleurs capable de tout balayer sur leur passages.
Je continue ma progression où je croise régulièrement des bâtisses isolées au milieu de nulle part et semblant abandonnées. Leur construction récente semble démentir cette hypothèse, mais je serais curieux de connaitre leur utilité.
Paradoxalement, alors que le navigation est des plus simple ici, je jardine un peu ratant systématiquement les embranchements. Je devrais rêvasser un peu moins et être plus concentré ! Mais je ne suis pas perdu, je traverse encore plusieurs gros villages au mélange de constructions en parpaings et en brique et pisé.
Les affres climatiques sur ce genre de construction sont partout visibles, impossible à réparer et entretenir, obligeant les habitants à abandonner leur logement au bout de quelques dizaines d'années et de reconstruire un peu plus loin.
C'est exactement la même chose en Afrique noire comme au Mali où je me rappelle très bien, dans la région de Sikasso, où l'on nous avait vanté les mérites de la curiosité locale, les tatas, anciennes fortifications et fierté locale. Une fois sur place, profondément déçu de ce que nous visitions, nous les avions qualifié peu diplomatiquement de "tata de boue", ce qui, à juste titre, avait profondément heurté la susceptibilité de nos hôtes !
Plus loin sur la route, j'arrive à un caravansérail que j'avais repéré sur Osmand. Il y en a pas mal ici comme partout sur la route de la soie.
De bonne dimension et plutôt bien conservé, une petite visite s'impose.
A l'intérieur, une vaste cour délimitée par le mur d'enceinte et des bâtiments.
Ce type d'architecture est caractéristique des pays désertiques où le bois fait cruellement défaut. Point de charpente, juste des constructions en voute édifiées avec des briques et crépies au pisé. Ce matériaux très friable a de nombreuses caractéristiques intéressantes, notamment thermiques, mais résiste malheureusement très mal au temps qui passe. Je ne peux m'empêcher d'essayer d'imaginer la vie qui devait y régner, où hommes et bêtes de somme devaient cohabiter tant bien que mal.
L'heure tourne et je suis impatient de reprendre la route, surtout que la piste traversant le désert n'est pas loin. Autant dire que je ne fais pas de vieux os ici et que c'est tout excité que je remonte sur ma moto. Je bascule la vue de navigation en mode satellite et gaz.
Mais elle est où ma petite piste perdue dans le désert ?
Plusieurs fois je vérifie sur ma tablette, pas de doutes, elle est censée être là.
Déception.
A la place il n'y a qu'une autoroute sans véritable intérêt qui fonce droit dans la montagne.
Je comprends vite. C'est une piste tracée uniquement pour la construction de la ligne électrique qui la borde. Ce n'est pas la première fois que j'en emprunte. Sur le même principe, j'ai plusieurs fois suivi des pistes crées récemment pour l'édification d'éoliennes en Espagne qui, bien souvent, offrent l'avantage de serpenter sur les lignes de crête offrant alors un point de vue remarquable.
Cruelle déception.
Le désert tant attendu, tel l'Arlésienne, se fait désirer et ne sera pas encore pour aujourd'hui. Contre mauvaise fortune bon cœur dit le proverbe.
Ainsi va la vie.
J'oublie vite cette déconvenue et profite de ce qui s'offre à moi, une piste brute, à peine travaillée et épousant les reliefs de la montagne.
S'en suit alors une séance de montagnes russes ou grimpettes sévères et descentes du même acabit s'enchainent dans un décors aux couleurs changeantes au gré de la nature des sols traversés. Une fois encore la PR7 fait merveille tractant sans relâche même lorsque le sol a une portance plus que limité.
Une fois encore, j'évite de me laisser griser et reste sur mes gardes sans pouvoir cacher mon plaisir de rouler. La navigation que je pensais délicate est en réalité enfantine avec cette immense saignée inratable. Décidément, aujourd'hui, j'aurais eu tout faux !
La fin de l'après-midi approche et avec elle, le bitume.
Je rebascule Osmand en mode navigation et m'élance pour les 35 derniers kilomètres me séparant de la ville des portes du désert célèbre pour ses tours de vent.
Mon ami, guide touristique rencontré à Trabiz, m'ayant recommandé un hôtel dans la vieille ville, je n'aurais pas à galérer pour trouver un logement.
Demain ce sera journée off, je troquerai ma moto pour mes baskets pour la visite de la ville.
Re: Adventure is going on ...
Ça y est, c'est parti. Basket, lunettes de soleil, petit sac à dos avec de l'eau, je pars à la découverte de Yazd.
Grand beau temps et cela change des derniers jours où j'ai dû composer sans cesse avec les averses. Les portes du désert tiennent leurs promesses !
Mon hôtel étant dans la vieille ville rénovée, le quartier est essentiellement dévolu au tourisme. Beaucoup de panneaux sont en anglais, c'est très joli mais un peu trop carte postale pour moi.
Je m'enfonce très rapidement dans les petites ruelles au hasard, à l'envie, au feeling.
Dès les premiers pas je me prends à retrouver cette ambiance si particulière des villes du désert que j'avais rencontré au Mali, comme Djenné et Tombouctou, mais en plus moderne, plus urbanisé, et surtout plus propre. Une ville du désert très européenne en fait.
Avec le recul je me rend compte que l'Iran et les iraniens sont finalement très européens, aussi bien physiquement, culturellement que dans leur façon de se vêtir et de vivre au quotidien. Ils ont même un art culinaire tel qu'on le conçoit chez nous et au Japon.
Il y a une certaine continuité ethnique et culturelle avec les Balkans et le Caucase. Alors oui, l'islam a grandement influencé des pans entiers de leur culture mais n'a nullement atteint les racines de ce peuple. Le contraste est d'autant plus flagrant en venant de Turquie, pourtant géographiquement plus proche de chez nous, mais moins européenne à mon sens. Une possible explication pourrait venir de l'origine des tucs actuels, descendants directs des Seldjoukides venus d'Asie Centrale qui sont arrivés en Anatolie avec eux leur propre culture orientale. Aussi, même plus proche de nous, le décalage civilisationnel est à mes yeux plus important qu'avec les Perses d'Iran.
C'est très étonnant et je ne m'y attendais pas du tout.
D'ailleurs, signe qui ne trompe pas, certains tagueurs en tout genre ont la même imagination étriquée que chez nous !
Heureusement, pas tous !
Et au détour d'une ruelle, les premières tours de vent ou badguir, les symboles de la ville. Ce sont des système naturels de climatisation exploitant uniquement les lois de la mécanique des fluides et de la thermodynamique.
La ville en est truffée, elles sont partout, comme ici pour refroidir une citerne d'eau.
Ou là, pour climatiser une partie du palais de Dowlat-âbâd.
Ce palais, résidence d'un ancien gouverneur, est isolé des turpitudes de la ville par un mur d'enceinte sobre mais néanmoins élégant.
A l'intérieur le jardin et son bassin occupent la majeure partie de l'espace. Verdure et eau, le couple gagnant de la climatisation naturelle extérieure que l'on retrouve très souvent dans les pays chauds, notamment dans les palais andalous de l'Alhambra et de l'Alcazar. Aux heures les plus torrides de la journée, il fait bon vraiment bon d'y flâner.
Dans le palais des hôtes, la pièce principale est une sorte de patio couvert avec, trônant en son centre, un bassin. Tout autour ainsi qu'à l'étage sont distribuées les pièces à vivre avec, comme toujours, cette architecture simple et chaleureuse.
Sur le côté, une autre pièce avec un bassin est surmontée par la tour de vent, la plus haute de Yazd. En levant les yeux, on aperçoit la base de la tour, segmentée en plusieurs conduits pour gérer les flux d'air chauds et froids. Pour faire simple, le principe est d'utiliser le vent pour extraire l'air chaud accumulé dans la bâtisse vers le haut tout en le remplaçant par de l'air plus frais. Le flux d'air chaud montant passant au-dessus du bassin en accélère l'évaporation de l'eau qui augmente l'effet rafraichissant. Cette pièce étant ouverte sur toutes les autres, c'est tout le bâtiment qui en profite.
Et cela fonctionne à merveille, il suffit de rester dessous quelques instants pour en sentir tout le bénéfice !
J'avais déjà entendu parler de ces attrapes vents en parcourant les récits d'autres voyageurs et, pour être tout à fait sincère, ma curiosité scientifique avait été grandement titillée si bien que je me devais de venir voir cela de plus près. Je m'étonne toujours, qu'à l'heure où l'urgence climatique est sur toutes les lèvres, que des solutions naturelles comme celle-ci ou le puit canadien ne soient pas plus mises en avant.
Je reprends mes déambulations. Me voici dans une des artères principales avec, à une extrémité, la tour de l'horloge.
Et de l'autre, la mosquée et l'entrée du bazar.
Celle mosquée est tout à fait atypique. Les minarets sont isolés sur un mur rappelant les clochers-murs de certaines églises dont un des exemples les plus représentatif est l'église du Taur à Toulouse. La mosquée proprement dite est ouverte su une grande esplanade. Une sorte de mosquée semi couverte.
Même le bazar dégage une impression différente, plus simple et plus chaleureux.
La présence de nombreuses boutiques d'artisanat et de vente de souvenirs confirment la vocation touristique de la ville.
J'y croise même une boulangerie avec les traditionnels fours à pain. Les galettes, aux formes d'une crêpe, sont collées sur la parois du four d'un geste sec et habile, leur faible épaisseur nécessitant un temps de cuisson très bref.
Me voici de nouveau sur un grand boulevard. Le choc est violent, tellement c'est bruyant et la chaleur, réfléchit par le bitume, étouffante.
Je ne m'y attarderai pas et replonge rapidement dans la vieille ville.
Où se côtoient des bâtiments en ruine
Et d'autres parfaitement entretenus.
Si ces constructions en brique et pisé sont particulièrement bien adaptées aux conditions climatiques chaudes, leur faible durée de vie reste un défi dans un urbanisme moderne.
Me voici maintenant sur la place centrale, encadrée par des arcades et prolongées par un bassin et un jardin.
Sur la droite, une citerne dont l'eau est rafraichie par cinq tours de vent.
Et derrière, une mosquée à l'architecture étonnante.
Je trouve cette place sans charme et je n'y reste pas. Je n'irais même pas visiter la mosquée. Non, pour moi l'âme de la ville est disséminée dans ces vieilles ruelles. Il n'y a rien de particulier à voir mais je m'y sens bien. L'absence de voiture, de bruit et une fraicheur relative y sont probablement pour quelque chose. Je m'y promène avec plaisir.
Tiens, une porte ouverte. Toujours curieux, je jette un œil. Personne, j'entre et stupeur, j'y découvre une demeure en rénovation, enfin, non, plutôt un palais !
Le plan est toujours le même, avec au centre, un grand bassin entouré par différents bâtiments. Sur un des côtés, les pièces principales surplombées par deux badguir. J'imagine facilement le charme de l'ensemble une fois fini, où l'eau, la verdure, le bois et les vitraux colorés achèveront de transformer cette bâtisse en un lieu chaleureux où il fera bon vivre.
L'après-midi touche à sa fin et je m'arrête dans un café pour prendre un gouter bien mérité pour clôturer cette journée bien remplie.
Demain, je reprends la route, direction Kerman, où j'ai prévu de faire la révision de la moto avant d'attaquer le désert du Luth.
Grand beau temps et cela change des derniers jours où j'ai dû composer sans cesse avec les averses. Les portes du désert tiennent leurs promesses !
Mon hôtel étant dans la vieille ville rénovée, le quartier est essentiellement dévolu au tourisme. Beaucoup de panneaux sont en anglais, c'est très joli mais un peu trop carte postale pour moi.
Je m'enfonce très rapidement dans les petites ruelles au hasard, à l'envie, au feeling.
Dès les premiers pas je me prends à retrouver cette ambiance si particulière des villes du désert que j'avais rencontré au Mali, comme Djenné et Tombouctou, mais en plus moderne, plus urbanisé, et surtout plus propre. Une ville du désert très européenne en fait.
Avec le recul je me rend compte que l'Iran et les iraniens sont finalement très européens, aussi bien physiquement, culturellement que dans leur façon de se vêtir et de vivre au quotidien. Ils ont même un art culinaire tel qu'on le conçoit chez nous et au Japon.
Il y a une certaine continuité ethnique et culturelle avec les Balkans et le Caucase. Alors oui, l'islam a grandement influencé des pans entiers de leur culture mais n'a nullement atteint les racines de ce peuple. Le contraste est d'autant plus flagrant en venant de Turquie, pourtant géographiquement plus proche de chez nous, mais moins européenne à mon sens. Une possible explication pourrait venir de l'origine des tucs actuels, descendants directs des Seldjoukides venus d'Asie Centrale qui sont arrivés en Anatolie avec eux leur propre culture orientale. Aussi, même plus proche de nous, le décalage civilisationnel est à mes yeux plus important qu'avec les Perses d'Iran.
C'est très étonnant et je ne m'y attendais pas du tout.
D'ailleurs, signe qui ne trompe pas, certains tagueurs en tout genre ont la même imagination étriquée que chez nous !
Heureusement, pas tous !
Et au détour d'une ruelle, les premières tours de vent ou badguir, les symboles de la ville. Ce sont des système naturels de climatisation exploitant uniquement les lois de la mécanique des fluides et de la thermodynamique.
La ville en est truffée, elles sont partout, comme ici pour refroidir une citerne d'eau.
Ou là, pour climatiser une partie du palais de Dowlat-âbâd.
Ce palais, résidence d'un ancien gouverneur, est isolé des turpitudes de la ville par un mur d'enceinte sobre mais néanmoins élégant.
A l'intérieur le jardin et son bassin occupent la majeure partie de l'espace. Verdure et eau, le couple gagnant de la climatisation naturelle extérieure que l'on retrouve très souvent dans les pays chauds, notamment dans les palais andalous de l'Alhambra et de l'Alcazar. Aux heures les plus torrides de la journée, il fait bon vraiment bon d'y flâner.
Dans le palais des hôtes, la pièce principale est une sorte de patio couvert avec, trônant en son centre, un bassin. Tout autour ainsi qu'à l'étage sont distribuées les pièces à vivre avec, comme toujours, cette architecture simple et chaleureuse.
Sur le côté, une autre pièce avec un bassin est surmontée par la tour de vent, la plus haute de Yazd. En levant les yeux, on aperçoit la base de la tour, segmentée en plusieurs conduits pour gérer les flux d'air chauds et froids. Pour faire simple, le principe est d'utiliser le vent pour extraire l'air chaud accumulé dans la bâtisse vers le haut tout en le remplaçant par de l'air plus frais. Le flux d'air chaud montant passant au-dessus du bassin en accélère l'évaporation de l'eau qui augmente l'effet rafraichissant. Cette pièce étant ouverte sur toutes les autres, c'est tout le bâtiment qui en profite.
Et cela fonctionne à merveille, il suffit de rester dessous quelques instants pour en sentir tout le bénéfice !
J'avais déjà entendu parler de ces attrapes vents en parcourant les récits d'autres voyageurs et, pour être tout à fait sincère, ma curiosité scientifique avait été grandement titillée si bien que je me devais de venir voir cela de plus près. Je m'étonne toujours, qu'à l'heure où l'urgence climatique est sur toutes les lèvres, que des solutions naturelles comme celle-ci ou le puit canadien ne soient pas plus mises en avant.
Je reprends mes déambulations. Me voici dans une des artères principales avec, à une extrémité, la tour de l'horloge.
Et de l'autre, la mosquée et l'entrée du bazar.
Celle mosquée est tout à fait atypique. Les minarets sont isolés sur un mur rappelant les clochers-murs de certaines églises dont un des exemples les plus représentatif est l'église du Taur à Toulouse. La mosquée proprement dite est ouverte su une grande esplanade. Une sorte de mosquée semi couverte.
Même le bazar dégage une impression différente, plus simple et plus chaleureux.
La présence de nombreuses boutiques d'artisanat et de vente de souvenirs confirment la vocation touristique de la ville.
J'y croise même une boulangerie avec les traditionnels fours à pain. Les galettes, aux formes d'une crêpe, sont collées sur la parois du four d'un geste sec et habile, leur faible épaisseur nécessitant un temps de cuisson très bref.
Me voici de nouveau sur un grand boulevard. Le choc est violent, tellement c'est bruyant et la chaleur, réfléchit par le bitume, étouffante.
Je ne m'y attarderai pas et replonge rapidement dans la vieille ville.
Où se côtoient des bâtiments en ruine
Et d'autres parfaitement entretenus.
Si ces constructions en brique et pisé sont particulièrement bien adaptées aux conditions climatiques chaudes, leur faible durée de vie reste un défi dans un urbanisme moderne.
Me voici maintenant sur la place centrale, encadrée par des arcades et prolongées par un bassin et un jardin.
Sur la droite, une citerne dont l'eau est rafraichie par cinq tours de vent.
Et derrière, une mosquée à l'architecture étonnante.
Je trouve cette place sans charme et je n'y reste pas. Je n'irais même pas visiter la mosquée. Non, pour moi l'âme de la ville est disséminée dans ces vieilles ruelles. Il n'y a rien de particulier à voir mais je m'y sens bien. L'absence de voiture, de bruit et une fraicheur relative y sont probablement pour quelque chose. Je m'y promène avec plaisir.
Tiens, une porte ouverte. Toujours curieux, je jette un œil. Personne, j'entre et stupeur, j'y découvre une demeure en rénovation, enfin, non, plutôt un palais !
Le plan est toujours le même, avec au centre, un grand bassin entouré par différents bâtiments. Sur un des côtés, les pièces principales surplombées par deux badguir. J'imagine facilement le charme de l'ensemble une fois fini, où l'eau, la verdure, le bois et les vitraux colorés achèveront de transformer cette bâtisse en un lieu chaleureux où il fera bon vivre.
L'après-midi touche à sa fin et je m'arrête dans un café pour prendre un gouter bien mérité pour clôturer cette journée bien remplie.
Demain, je reprends la route, direction Kerman, où j'ai prévu de faire la révision de la moto avant d'attaquer le désert du Luth.
L73 aime ce message
Re: Adventure is going on ...
Une fois de plus, je ne pars pas très tôt. Je quitte Yazd en fin de matinée par les grands boulevards.
Sous le regard perplexe d'une famille iranienne.
Au menu du jour, de la piste en tout début de parcours. Il semble qu'elle ne soit plus entretenue depuis un certain temps et je slalome entre différentes traces.
J'avance d'un bon rythme entre des parties plutôt bonnes.
Et d'autres plus abimées mais toujours roulantes. Le sol est porteur et si le paysage est désertique, il n'y a toujours pas de sable au menu, et tant mieux !
A plusieurs endroits il n'y a plus vraiment piste, juste un enchevêtrement de traces au sol partant un peu dans toutes les directions. Dans ce cas-là, je n'hésite pas à me fier à ma bonne étoile, Osmand, qui m'a toujours amener là où je le souhaitai.
Et rapidement le bitume refait surface jusqu'à Meyman où je décide de trouver où loger.
Et comme souvent, trouver un endroit ouvert et pas trop cher prend du temps. La pandémie semble avoir fait des ravages dans les petites guesthouses et je mets bien souvent une bonne heure pour trouver quelque chose qui me convienne. Mais aujourd'hui, contre toute attente, ma patience est récompensée au-delà de mes espérances. C'est juste grandiose et pour moins de 10€. Je sens que demain matin le départ sera plus que difficile !
En cette fin d'après-midi encore chaude, je vais me prélasser au frais à l'intérieur et préparer la navigation du lendemain qui s'annonce plus délicate.
Ce soir, quand la température sera plus agréable, le repas me sera servi dehors. Je suis le seul client et je ne peux m'empêcher de me demander comment font-ils pour vivre économiquement parlant. Car ici, comme dans beaucoup d'autres pays du monde, chacun a dû se débrouiller comme il pouvait contrairement à chez nous, où tout le monde a bien profité des aides de l'état tout en râlant sur la gestion de la crise.
Au petit matin je me force à partir relativement tôt car j'ai encore pas mal de kilomètres à faire dont pas mal de piste. Depuis hier je roule dans cette ambiance très désertique même si le sable en est le grand absent.
Du goudron particulièrement monotone pour débuter la journée. Cela à au moins l'avantage de faire tourner l'odomètre.
Et rapidement les grosses pistes roulantes refont leur apparition. Je reste néanmoins raisonnable sur la poignée de gaz car je redoute la traitresse portion de sable bien mou qui m'enverrai au tapis.
Je pensais visiter un caravansérail très bien restauré, mais il est fermé. Peu importe, c'est l'occasion de discuter avec deux cyclotouristes iraniens qui visitent leur pays à la force de leurs mollets. Voilà bien une chose à laquelle je ne m'attendais pas à trouver ici. L'Iran n'arrête pas de me surprendre.
Je reprends la route et là, la navigation commence à devenir compliquée. Il y a beaucoup de traces plus ou moins parallèles que j'interprète comme différentes variantes de la même piste. Parfois c'est bien ça, mais parfois non et je m'éloigne inexorablement du cap à suivre. Parfois je coup tout droit en hors-piste pour retrouver la trace d'Osmand, parfois je ne le sens pas et fait demi-tour. Mais à chaque fois je m'arrête pour réfléchir et prendre une décision et ma moyenne horaire ne s'améliore pas !
Tien, que fait-il tout seul ici perdu au milieu de nulle part ? Il est tout calme, peut être assoiffé et affamé, mais au moins, pour une fois il n'essaie pas de me mordre !
Et ce qui devait arriver arriva, le sable fait son apparition, doucement, gentiment, progressivement.
Ma première expérience de sable avec la PR7. Enfin, pas tout à fait exact. A peine rodée, en traversant les Landes, je l'avais bien involontairement planté jusqu'au sabot. Conclusion, quand s'est mou, c'est mou !
Dans ces cas-là, une seule solution, coucher la belle et la tirer sur un terrain plus porteur avant de la redresser.
Si j'avais été particulièrement bluffé de la facilité avec laquelle je m'étais sorti de ce piège, ici tout est différent. La moto chargée avoisine les 200 kg, je n'ai pas de pneus à tétines mais des mitas E07 mixtes et, cerise sur le gâteau, la température frôle les 40°C.
Autant dire que j'aborde ces nouvelles difficultés avec la plus grande prudence. La journée est encore longue et je n'ai nullement envie de galérer ici perdu au milieu du néant.
Néanmoins, je suis agréablement surpris car la moto est seine surtout l'avant qui reste facile à gérer même à faible allure contrairement à la 800 GS tout en lourdeur sur la fourche ce qui, dans ces conditions, est vite épuisant et ne pardonne aucune approximation comme ici, dans le désert de cendres volcaniques au sud d'Askja en Islande.
Cet intermède ne dure pas et rapidement je peux reprendre un rythme plus conséquent.
Après avoir passé toute la matinée sans rencontrer âme qui vive, un chien errant mis à part, le premier village même réduit à sa plus simple expression a des air de civilisation.
Et le bitume est de retour, immense ruban d'asphalte rectiligne que rien ne semble infléchir. Outre la moyenne horaire qui reprend des couleurs, rouler sur une belle route désertique est tout particulièrement reposant et je peux me laisser aller à rêvasser tout en cruisant en mode automatique.
Quelques villages traversés me font penser aux westerns de ma jeunesse, avec quelques bâtiments éparses répartis le long de la seule rue.
Si les courbes sont toujours absentes, le terrain commence à changer de physionomie.
Les premiers contreforts montagneux apparaissent agrémenté de quelques virages.
Très rapidement, en quelques kilomètres, les paysages désertiques laissent place à un décor classique de montagne. Je commence à prendre de l'altitude et la température décroit d'autant.
En préparant la navigation la veille au soir, j'avais repéré deux options. Contourner ce massif par la route ou couper tout droit et le traverser par la piste. Je m'étais laissé le choix sur le moment en fonction de l'heure et de mon état de fatigue. Je suis en pleine forme et j'ai encore le temps devant moi, alors, je ne tarde pas à quitter le goudron.
Quel bonheur de retrouver ces pistes de montagnes empierrées après ces deux jours passés dans ces paysages désertiques !
Chemin facile, température modérée, paysages racoleurs, moto joueuse, il n'en faut pas plus pour que je me laisse aller.
Quelle idée de construire là. Un agoraphobe certainement !
Etonnant une retenue d'eau ici loin de toute culture.
Surtout qu'elle n'est pas la seule dans le coin. La hauteur du barrage me semble disproportionnée par rapport à la flaque d'eau présente. Une fois de plus l'Iran semble en proie à de graves problèmes de gestion de leurs ressources hydrauliques.
Mais en l'instant, ce qui me tracasse plus, c'est que la piste devant moi est coupée.
Heureusement, je repère un contournement à proximité. Je vais reconnaitre à pieds auparavant. Pas de difficultés à l'horizon, alors c'est parti.
Me revoila en plaine avec de larges pistes roulantes.
Pour retrouver le bitume. Je profite des derniers virages avant de retrouver la quatre voies qui me conduit directement à Kerman.
Le lendemain, révision de la moto car demain j'attaque … le désert du Luth, réputé pour être balayé par des vents violents et être un des endroits les plus chauds de la planète ! J'espère que Jésus fera des miracles et que la PR7 sera au top pour affronter cette nouvelle aventure !
Sous le regard perplexe d'une famille iranienne.
Au menu du jour, de la piste en tout début de parcours. Il semble qu'elle ne soit plus entretenue depuis un certain temps et je slalome entre différentes traces.
J'avance d'un bon rythme entre des parties plutôt bonnes.
Et d'autres plus abimées mais toujours roulantes. Le sol est porteur et si le paysage est désertique, il n'y a toujours pas de sable au menu, et tant mieux !
A plusieurs endroits il n'y a plus vraiment piste, juste un enchevêtrement de traces au sol partant un peu dans toutes les directions. Dans ce cas-là, je n'hésite pas à me fier à ma bonne étoile, Osmand, qui m'a toujours amener là où je le souhaitai.
Et rapidement le bitume refait surface jusqu'à Meyman où je décide de trouver où loger.
Et comme souvent, trouver un endroit ouvert et pas trop cher prend du temps. La pandémie semble avoir fait des ravages dans les petites guesthouses et je mets bien souvent une bonne heure pour trouver quelque chose qui me convienne. Mais aujourd'hui, contre toute attente, ma patience est récompensée au-delà de mes espérances. C'est juste grandiose et pour moins de 10€. Je sens que demain matin le départ sera plus que difficile !
En cette fin d'après-midi encore chaude, je vais me prélasser au frais à l'intérieur et préparer la navigation du lendemain qui s'annonce plus délicate.
Ce soir, quand la température sera plus agréable, le repas me sera servi dehors. Je suis le seul client et je ne peux m'empêcher de me demander comment font-ils pour vivre économiquement parlant. Car ici, comme dans beaucoup d'autres pays du monde, chacun a dû se débrouiller comme il pouvait contrairement à chez nous, où tout le monde a bien profité des aides de l'état tout en râlant sur la gestion de la crise.
Au petit matin je me force à partir relativement tôt car j'ai encore pas mal de kilomètres à faire dont pas mal de piste. Depuis hier je roule dans cette ambiance très désertique même si le sable en est le grand absent.
Du goudron particulièrement monotone pour débuter la journée. Cela à au moins l'avantage de faire tourner l'odomètre.
Et rapidement les grosses pistes roulantes refont leur apparition. Je reste néanmoins raisonnable sur la poignée de gaz car je redoute la traitresse portion de sable bien mou qui m'enverrai au tapis.
Je pensais visiter un caravansérail très bien restauré, mais il est fermé. Peu importe, c'est l'occasion de discuter avec deux cyclotouristes iraniens qui visitent leur pays à la force de leurs mollets. Voilà bien une chose à laquelle je ne m'attendais pas à trouver ici. L'Iran n'arrête pas de me surprendre.
Je reprends la route et là, la navigation commence à devenir compliquée. Il y a beaucoup de traces plus ou moins parallèles que j'interprète comme différentes variantes de la même piste. Parfois c'est bien ça, mais parfois non et je m'éloigne inexorablement du cap à suivre. Parfois je coup tout droit en hors-piste pour retrouver la trace d'Osmand, parfois je ne le sens pas et fait demi-tour. Mais à chaque fois je m'arrête pour réfléchir et prendre une décision et ma moyenne horaire ne s'améliore pas !
Tien, que fait-il tout seul ici perdu au milieu de nulle part ? Il est tout calme, peut être assoiffé et affamé, mais au moins, pour une fois il n'essaie pas de me mordre !
Et ce qui devait arriver arriva, le sable fait son apparition, doucement, gentiment, progressivement.
Ma première expérience de sable avec la PR7. Enfin, pas tout à fait exact. A peine rodée, en traversant les Landes, je l'avais bien involontairement planté jusqu'au sabot. Conclusion, quand s'est mou, c'est mou !
Dans ces cas-là, une seule solution, coucher la belle et la tirer sur un terrain plus porteur avant de la redresser.
Si j'avais été particulièrement bluffé de la facilité avec laquelle je m'étais sorti de ce piège, ici tout est différent. La moto chargée avoisine les 200 kg, je n'ai pas de pneus à tétines mais des mitas E07 mixtes et, cerise sur le gâteau, la température frôle les 40°C.
Autant dire que j'aborde ces nouvelles difficultés avec la plus grande prudence. La journée est encore longue et je n'ai nullement envie de galérer ici perdu au milieu du néant.
Néanmoins, je suis agréablement surpris car la moto est seine surtout l'avant qui reste facile à gérer même à faible allure contrairement à la 800 GS tout en lourdeur sur la fourche ce qui, dans ces conditions, est vite épuisant et ne pardonne aucune approximation comme ici, dans le désert de cendres volcaniques au sud d'Askja en Islande.
Cet intermède ne dure pas et rapidement je peux reprendre un rythme plus conséquent.
Après avoir passé toute la matinée sans rencontrer âme qui vive, un chien errant mis à part, le premier village même réduit à sa plus simple expression a des air de civilisation.
Et le bitume est de retour, immense ruban d'asphalte rectiligne que rien ne semble infléchir. Outre la moyenne horaire qui reprend des couleurs, rouler sur une belle route désertique est tout particulièrement reposant et je peux me laisser aller à rêvasser tout en cruisant en mode automatique.
Quelques villages traversés me font penser aux westerns de ma jeunesse, avec quelques bâtiments éparses répartis le long de la seule rue.
Si les courbes sont toujours absentes, le terrain commence à changer de physionomie.
Les premiers contreforts montagneux apparaissent agrémenté de quelques virages.
Très rapidement, en quelques kilomètres, les paysages désertiques laissent place à un décor classique de montagne. Je commence à prendre de l'altitude et la température décroit d'autant.
En préparant la navigation la veille au soir, j'avais repéré deux options. Contourner ce massif par la route ou couper tout droit et le traverser par la piste. Je m'étais laissé le choix sur le moment en fonction de l'heure et de mon état de fatigue. Je suis en pleine forme et j'ai encore le temps devant moi, alors, je ne tarde pas à quitter le goudron.
Quel bonheur de retrouver ces pistes de montagnes empierrées après ces deux jours passés dans ces paysages désertiques !
Chemin facile, température modérée, paysages racoleurs, moto joueuse, il n'en faut pas plus pour que je me laisse aller.
Quelle idée de construire là. Un agoraphobe certainement !
Etonnant une retenue d'eau ici loin de toute culture.
Surtout qu'elle n'est pas la seule dans le coin. La hauteur du barrage me semble disproportionnée par rapport à la flaque d'eau présente. Une fois de plus l'Iran semble en proie à de graves problèmes de gestion de leurs ressources hydrauliques.
Mais en l'instant, ce qui me tracasse plus, c'est que la piste devant moi est coupée.
Heureusement, je repère un contournement à proximité. Je vais reconnaitre à pieds auparavant. Pas de difficultés à l'horizon, alors c'est parti.
Me revoila en plaine avec de larges pistes roulantes.
Pour retrouver le bitume. Je profite des derniers virages avant de retrouver la quatre voies qui me conduit directement à Kerman.
Le lendemain, révision de la moto car demain j'attaque … le désert du Luth, réputé pour être balayé par des vents violents et être un des endroits les plus chauds de la planète ! J'espère que Jésus fera des miracles et que la PR7 sera au top pour affronter cette nouvelle aventure !
L73 aime ce message
Re: Adventure is going on ...
A l'assaut du désert du Luth, Iran.
Pour changer, l'excitation est telle ce matin, que je n'ai aucun mal à prendre la route tôt. La veille, après une révision approfondie de la PR7, j'avais préparé avec minutie la navigation du jour et, surtout, les ravitaillements en essence. Je prévois de traverser une partie du désert par la piste et une autre en hors-piste sans trop m'éloigner de la route, comme à mon habitude, histoire de m'immerger dans cet environnement quasi mystique sans prendre trop de risque.
Je quitte Kerman par la quatre voie pour m'en éloigner rapidement.
Arrivent ensuite les premiers contreforts montagneux.
Et les premières pistes bordées de villages entiers en ruine.
La piste est belle et je peux tracer sans risque. Les premières concrétions apparaissent. Je ne sais pas s'il s'agit de roches très friables ou d'une agglomération de sable et d'argile, mais la diversité des sols est très étonnante.
S'en suit quelques oasis plantées de palmiers dont la traversée est bitumée.
Et de nouveau cette terre craquelée parsemée de grosses taches blanches, remontées de sel probablement.
Et le goudron disparait enfin pour de bon. Comme lorsque j'ai traversé le lac salé de Tuz en Turquie, j'ai l'impression de rouler ici sur de la crème brulée, une croute plus ou moins solide au-dessus d'un sable bien mou. J'entends la croute se briser sous le poids de la moto.
Etrange sensation.
Je suis très concentré sur la trajectoire car, s'enliser doit être très facile et, vu la température, dans les 40°C, se désensabler serait nécessairement synonyme de grosse suée !
La navigation est des plus simple, suivre un grand couloir entre deux cordons de dunes ou de montagnes, je ne sais pas trop comment les qualifier. Enfin, cela ne dure pas trop. Rapidement j'arrive à une bifurcation. Osmand me dit de prendre à droite pour traverser le cordon de dunes, mais des traces me laissent supposer que l'on peut continuer et trouver un autre passage.
Il y a bien un petit tas de pneus indiquant la bifurcation.
Ce n'est pas la première fois que je vois ce genre de repère pour changer de direction, comme ici, sur la route entre Nouakchott et Nouadhibou en Mauritanie, où, la carcasse de voiture plantée signifie : quitter le bitume et tracer plein est pour aller vers Atar. Ok, ce n'est marqué nulle part, donc si personne ne vous a rencardé, c'est fichu !
Avant de ma lancer tête baissée dans les dunes, je pars à pieds en reconnaissance. Il y a un premier mur au sol porteur qui ne devrait pas poser de problème, mais une fois en haut la piste serpente sur les dunes et la croute, plus ou moins dure, semble de plus en plus fragile. Résistera-t-elle au poids de la PR7 ? J'hésite. C'est le début de la matinée, j'ai encore beaucoup de route à faire, la chaleur est déjà bien présente et, honnêtement, je n'ai pas envie de me mettre en galère. Je décide donc de tenter la chance en suivant les traces qui vont tout droit.
Je suis aux anges. Il n'y a plus de voyage qui compte, plus de destination, plus de contraintes, plus rien. Juste une nature vierge, ma moto et moi. Sensation indescriptible de rouler là dans une sorte d'état second où le temps semble lui-même être suspendu. Ce sont ces moments de moto que je préfère, et de loin. Depuis que j'y ai gouté pour la première fois dans le Sahel, j'en suis devenu accro, surtout qu'avec les GPS modernes on peut s'y adonner en toute sécurité, ce qui n'étais pas le cas autrefois lorsque nous ne disposions que de cartes papiers imprécises et d'une boussole. Avec le recul et l'âge, je me dis que plus jeune, j'ai eu beaucoup de chance. Mais là, aujourd'hui, je me sens bien et en toute sécurité. Alors j'en profite comme jamais.
Mais toutes les bonnes choses ont une fin. La partie porteuse s'arrête net pour laisser la place à une mer de sable fin.
De part et d'autres, les restes d'une palissade en tronc de palmier, dérisoire rempart à la désertification.
La progression des déserts est une véritable problématique pour beaucoup de pays. Je ne peux m'empêcher de repenser à la ville sainte de Chinguetti, autrefois important centre culturel et commercial, qui est aujourd'hui envahie par les sables du Sahara.
Impossible de m'aventurer là seul à moto, surtout que le vent s'est levé.
Je n'ai pas d'autres choix que de rebrousser chemin un temps. Je découvre alors une sorte de centre de vacances abandonné, une sorte de Club Med en plein désert. Un coin intéressant pour bivouaquer le cas échéant que je note dans mes waypoints.
Je retrouve une piste roulante.
Puis le bitume ce qui me permet d'abattre des kilomètres, car, à vrai dire, pour le moment, je n'ai pas beaucoup avancé. J'ai repéré sur Osmand une station essence où j'avais prévu de faire le plein. Malheureusement, elle a été démantelé et seuls les bâtiments abandonnés subsistes. Cela est problématique car je ne vois rien d'autres dans la région où ravitailler, pas le moindre patelin où je pourrais trouver de l'essence en bouteille. Je prends le temps de boire un coup et de réfléchir. J'estime la distance qui me reste à parcourir, sachant que comme j'ai prévu du hors-piste, je ne sais pas exactement. Cela devrait passer avec l'autonomie de la PR7, si, comme à mon habitude, je reste raisonnable sur la poignée de gaz.
J'arrive dans la région que je voulais traverser avec les premiers Kaluth, ces formations rocheuses au milieu du désert.
Je quitte le bitume et c'est parti ! C'est juste irréel, une sorte de paysage de pythons rocheux dignes d'un western à la Sergio Léon planté en plein désert de sable balayé par les vents. Je navigue à vue, serpentant entre les concrétions rocheuses à la recherche du sol porteur pour éviter de m'enliser tout en essayer de garder le cap donné par Osmand. J'ai surtout l'impression de rouler dans un labyrinthe. Et, tout d'un coup, cela fait tilt dans ma petite tête et je m'arrête d'un coup. Qui dit labyrinthe dit facile de se perdre. Je sors donc mon fil d'Ariane, enfin, la fonction d'Osmand pour enregistrer mon parcours. Si besoin est, je pourrais facilement revenir sur mes pas. Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt? Parfois j'ai vraiment l'impression d'être un sempiternel débutant !
Je repars sans plus attendre et, rapidement, j'ai l'impression de naviguer sur une mer de sable d'où émerge quelques ilots rocheux. C'est juste fou ! Depuis le temps que je roule ma bosse par monts et par vaux, j'ai connu pas mal de terrains différents, mas jamais comme ici. Je suis hors du temps, j'oublie tout et me contente de rouler en vérifiant régulièrement de garder globalement le cap.
C'est là que je me dis que, vu du ciel, ce doit être complètement incroyable. Je n'ai pas de drone mais … je peux monter sur un pic rocheux ! Voilà une bonne idée ou, peut-être pas, mais si je ne teste pas, je ne saurais jamais. Et me voici parti cherchant à grimper sur un point haut comme si je n'avais rien d'autre à faire.
Mais j'ai bien fait car le spectacle est grandiose. Je profite de la vue qui s'offre à moi et je réalise alors que le vent a pas mal forci depuis tout à l'heure et, qu'en bas, la visibilité diminue rapidement. Tout d'un coup je redescends sur terre rattrapé par la réalité.
L'après-midi est bien entamée, le vent se renforce généralement avec la tombée du jour, je suis très limite question essence et je suis au milieu de nulle part en dehors de toute piste ou voie de communication et, qui plus est, sans réseau. S'il m'arrive le moindre problème je ne pourrais espérer l'aide de personne et ma seule option serait alors de déclencher ma balise de détresse, ce que j'aimerai éviter à tout prix. Le bon côté des choses c'est que j'ai suffisamment d'eau et, qu'avec Osmand, je ne suis jamais perdu. Mais si je tombe en panne sèche, je ne serais pas plus avancé pour autant de savoir où je suis !
Il me faut donc faire un choix. Je crois que si mon amis Arnaud était là avec sa 701, je dirais banco. Mais seul, le risque me semble déraisonnable. Je n'ai pas de marge de manœuvre, pas de plan B et les tempêtes de sable, je connais depuis le Sahara et cela ne me tente pas vraiment.
Le choix me semble évident mais j'hésite tellement le moment est incroyable et que j'aimerai le prolonger. Pour me motiver je me persuade que j'ai encore d'innombrables choses à vivre durant ce voyage et qu'il serait complètement stupide de foncer tête baissée dans les problèmes en toute connaissance de cause.
J'affiche donc sur Osmand la trace enregistrée et je rebrousse chemin. Il ne me faut pas longtemps pour oublier ma déception et me concentrer juste sur l'instant présent. J'en profite à me gaver.
J'arrive à la fin de la trace enregistrée. Je vois bien le bitume là, à quelques centaines de mètres, mais je jardine, tourne en rond pour contourner les bancs de sables mous et éviter de m'enliser sans arriver à rejoindre la route. La force du vent augmente rapidement confirmant la justesse de mon choix. Alors, je m'arrête, repère la position de ma moto sur Osmand, et pars en reconnaissance à pieds pour trouver le passage, économisant par la même un peu d'essence qui risque de me faire cruellement défaut. Enfin me voici sur la route. Je remonte chercher ma moto et quelques minutes plus tard, je suis sur le goudron. Heureusement que j'ai eu la présence d'esprit d'enregistrer la trace même un peu tardivement, sinon je serais toujours là-bas à jardiner !
Plus j'avance et plus le vent forci, créant ici et là des congères de sable barrant parfois totalement la route.
C'est ce que je redoute le plus, car je n'oublie pas mon copain Eric qui, sur une toute petite congère sur le goudron entre Nouakchott et Nouadhibou est tombé, avec pour conséquence une grave entorse et rapatriement sanitaire en France. Fini l'aventure pour lui.
Le vent est si violent qu'il créé un brouillard de sable tel que la caméra distingue difficilement le bitume du sable, mais moi, engoncé dans mon casque, je vois moitié moins bien car évidement, impossible de rouler visière ouverte sous peine d'avoir l'impression de passer à la sableuse. C'est peut être une bonne solution pour ressortir avec une peau de bébé, mais simplement invivable là, sur la moto, à cet instant. Parfois je ne me guide qu'avec Osmand roulant tout doucement pour éviter de me planter dans ces congères.
Parfois la visibilité s'améliore un peu alors j'augmente doucement le rythme tout en restant en mode "Emergency", c’est-à-dire que plus rien ne compte à part sortir indemne de cette situation.
Souvent on me demande quelles sont les principales qualités nécessaires pour voyager de la sorte. Mes interlocuteurs s'attendent à ce que je leur parle conduite tout terrain ou mécanique, mais non. Pour moi, voyager, c'est être capable de rouler quel que soit l'état de la route, de la piste et surtout, de la météo. Car c'est dans ces moments-là où, seul au monde, quand les éléments semblent se liguer contre moi qu'il faut avancer coute que coute. Et dans ces là, je serre les fesses avec tous les sens aux aguets pour essayer d'anticiper au mieux la situation. Je vois ma jauge à essence au plus bas et la distance restant à parcourir avant la prochaine ville toujours conséquente. Là, je ne me berce plus d'illusion, c'est sans équivoque, je n'y arriverai pas. Je m'arrête pour verser mes deux litres de réserves dans le réservoir. J'en profite pour chercher sur Osmand un patelin, une maison isolé, un truc même riquiqui, mais peu importe, j'y dénicherai bien de l'essence en bouteille. Je trouve un village, Dehselm, 110 km. Avec un peu de chance, je devrais y arriver avec comme priorité, me mettre à l'abri pour la nuit. Pour l'essence, chaque chose en son temps, je verrais cela demain. Je roule le plus tranquillement possible pour économiser au mieux le précieux carburant. Entre le sable, le vent violent et les différents jardinages de la journée, j'ai consommé plus que la normale. Cela semble néanmoins jouable. En me rapprochant de Dehselm, je commence à croiser quelques véhicules. Je suis grandement soulagé car jusqu'à présent, j'étais plutôt seul au monde !
Plus qu'une quinzaine de kilomètres, j'y crois plus que jamais mais le destin en décide autrement, la moto ratatouille, la panne sèche n'est pas loin. Deux doigts sur l'embrayage prêt à débrayer au moment fatal et, quelques secondes plus tard, me voici en roue libre. Je gare la moto sur le côté gauche de la route pour pouvoir allumer mes phares si j'entends un véhicule arriver et je scrute l'horizon, le casque toujours vissé sur la tête pour me protéger du sable. Je n'attends pas trop longtemps, une camionnette arrive. Je fais des grand gestes et elle s'arrête. J'avais préparé mon petit laïus sur le traducteur de mon téléphone, lui montre, et, après un traditionnel Salam Aleykoum, il me dit juste "no benzine no benzine" et démarre en trombe. Pour une fois que je suis vraiment en détresse, je tombe sur le seul iranien antipathique !
Je ne me décourage pas pour autant et attends. De toute façon, je ne peux rien faire d'autre ! Enfin, une voiture s'arrête, quatre hommes à l'intérieur. Rebelotte, je leur montre mon téléphone et tout de suite ils réagissent. Trois d'entre eux descendent de la voiture, ouvrent le coffre et je comprends au premier coup d'œil. Ils ont une moto pompe et se proposent de me donner l'essence du réservoir. Un litre ferait l'affaire, mais il me baragouine quelque chose tout en mimant.
Bingo, je tilte. Je retourne à ma moto, prends une de mes bouteilles d'eau, mon couteau et sépare le goulot du reste. Je leur tends le cul de la bouteille qu'ils remplissent tant bien que mal. Ensuite, avec le goulot comme entonnoir, l'essence est versée dans mon réservoir. Ils insistent pour me donner tout ce qu'ils ont, environ 3 ou 4 litres à vue de nez. Je les remercie chaleureusement, leur demande combien je dois mais ils refusent évidement quoi que ce soit.
Me voici soulagé, mon principal problème étant résolu. Ne reste plus qu'à trouver un abris pour la nuit, ce qui ne devrait pas être trop difficile vu l'hospitalité des gens.
Je reprends la route, mes bons samaritains poursuivant la leur à contre sens. Plus que quelques kilomètres avant le village quand je vois des phares dans mes rétroviseurs. Je sais que, de l'arrière, je ne suis pas trop visible, alors je suis très attentif, mettant quelques coups de frein pour alerter au mieux de ma présence. Une voiture me double en klaxonnant et, devinez, ce sont mes sauveurs du jour ! Enfin, presque. De quatre ils ne sont plus que deux adultes et un gamin. Cela reste un mystère pour moi vu que je pensais qu'il n'y avait rien ici. Mais peu importe, je comprends vite, ils me font signe de les suivre.
Quelques minutes plus tard nous arrivons au village de Dehselm où je les suis jusqu'au portail d'une concession. Le conducteur descend et déniche une clé de sous une pierre. Ils me font rentrer la PR7 et garent leur voiture un peu plus loin dans la cours.
Je descends de la moto, tombe mon casque et je souffle, soulagé. Je ne sais pas si déjà le vent faibli ou si c'est le mur d'enceinte qui joue son rôle protecteur, mais, à l'instant, je me sens hors de danger et … vidé. Le simple fait d'avoir ôté mon casque et de me savoir en sécurité dissipe instantanément toutes la tension nerveuse de ces dernières heures. Je me sens bien. J'en aurais presque oublié mes hôtes qui viennent me voir. Ils ne parlent pas un mot d'anglais évidemment, il va falloir une fois encore faire confiance au traducteur. Avant d'entrer dans la maison, vu que nous sommes entre hommes, non seulement j'enlève mes bottes comme le veut la coutume, mais aussi ma veste de moto ainsi que mon pantalon. Bien m'en a pris, car sous moi se forme un petit tas de sable. Vu la température, j'avais toutes les écoutilles ouvertes et j'en avais partout, mais vraiment partout. Je me secoue pour éviter d'en tapisser l'intérieurs et passe un pantalon de fine toile avant d'entrer.
Nous nous installons sur les tapis et ils m'offrent le traditionnel thé. La discussion débute, laborieuse, et je finis par comprendre que nous sommes chez le frère d'un des deux hommes. J'apprends que c'est la saison des tempêtes de sable, que le vent forcit en fin d'après-midi pour disparaitre avec le coucher du soleil.
Ils m'assaillent de questions et, pour être tout à fait honnête, à cet instant, je voudrais juste que l'on me fiche la paix pour que je puisse m'assoupir un petit peu. Mais je suis leur invité et j'ai maintenant pour devoir d'assouvir leur curiosité. C'est souvent le pendant de l'hospitalité et il faut l'accepter. Et c'est parti, le sempiternel laïus, d'où je viens, où je vais, quel âge j'ai, ma profession, femme, enfants, veaux, vaches et cochons, tout y passe.
Alors que la discussion bat son plein, je sens comme un malaise que je n'arrive pas à percer. Finalement l'un d'entre eux se lance. Ils n'avaient pas prévu de rester ici et i n'y a rien à manger. Ils semble effondré, limite déshonoré. Je suis soudainement soulagé. Ce n'est pas bien grave, je les rassure car j'ai tout ce qu'il faut. Pour une fois, c'est moi qui invite !
La dernière fois que j'avais invité quelqu'un de la sorte, au milieu de nulle part, c'était Rahel, sur la piste du refuge en Islande. Souvenirs …
Mais je n'ai pas le temps de rêvasser. Je retourne à la moto et vais chercher mon sac spécial bivouac. Je déballe mon barda devant leur air médusé. Le clou du spectacle étant mon réchaud. Ils n'ont pas l'air de me croire quand je leur explique que, même aussi petit, il chauffe du feu de dieu !
Comme une bonne expérience vaut mieux qu'un barbant discours, je leur fait une petite démonstration. Là j'ai définitivement marqué des points. Ils sont juste subjugués par la taille de la mini bouteille de gaz. Je profite de mon avantage et sors le grand jeu, mes repas lyophilisés de grande gastronomie française, rien que cela ! Voyez plutôt, poulet à l'orientale, brandade de morue, raclette et pâtes à la provençale.
Alors que je pensais avoir définitivement remporté la victoire, leur air incrédule me fait soudainement douter. Je ne vais pas me décourager pour autant, j'ouvre un des sachet et leur montre. Ils sentent, enfin, reniflent plus exactement et semblent encore plus dubitatifs. OK, je conçois que, qui n'a jamais vu cela doit bien hésiter à savoir si c'est du lard ou du cochon, et, pour ce qui est du cochon, je ne suis pas au meilleurs endroit.
Qu'à cela ne tienne, je fais bouillir de l'eau et prépare le sachet ouvert. Je remue consciencieusement, laisse imbiber le temps préconisé et voilà, c'est prêt. Je sors mes gamelles, partage le tout et l'offre à mes hôtes.
Ils goutent et là, comment dire, un grand moment de solitude comme diraient mes enfants ! Seul la politesse et leur devoir d'hospitalité les empêchent certainement de tout recracher illico presto. Je dois admettre ma défaite, je n'aurais pas été un grand ambassadeur de la gastronomie française malgré tous les efforts déployés !
Enfin, tout n'est pas perdu, je suis affamé puisque je n'ai rien avalé depuis le petit déjeuner. j'englouti le tout et ma foi, enfin, je les comprends, cela n'a rien d'extraordinaire. Cela a surtout le mérite de fournir les calories nécessaires à défaut d'être gouteux.
Sur le moment je n'y fais pas vraiment attention, mais l'un d'un a sorti son téléphone et passe plusieurs coups de fils, et le ton monte légèrement, enfin non, plutôt autoritaire.
Quelques minutes plus tard, la porte s'ouvre et deux femmes entrent les bras chargés de plats, la mère et la fille à en croire la différence d'âge. L'atmosphère se détend et, un peu plus tard, elles nous servent du ragout de mouton et des galettes de pain. Je dois avouer que c'est bien meilleur, sans l'ombre d'une hésitation ce qui entérine définitivement leur victoire, enfin, celle des femmes pour être tout à fait honnête car eux, comme à l'accoutumé, n'ont pas bougé le petit doigt.
Une fois le festin fini, les femmes débarrassent tout et s'éclipsent, nous laissant entre hommes.
C'est alors qu'ils m'offrent de fumer de l'opium. Ce n'est pas la première fois que l'on me le propose, mais ce n'est pas pour moi. S'ils avaient eu un digestif, cela aurait était avec grand plaisir, mais là, définitivement, sans façon.
La soirée se passe tranquillement et l'heure de dormir arrive. Ils sortent des couvertures et nous nous installons sur les tapis.
Au petit matin le soleil est de retour. Il y a une moto et de l'essence en bidon dans un appentis au fond de la cours. Il m'en propose 4 litres supplémentaires. Je lui paye avec ceux d'hier et un supplément pour le repas. J'en profite pour nettoyer mon filtre à air qui, en une seule journée, c'est bien emplit. Merci la chaussette de protection !
C'est l'heure des embrassades et du départ pour de nouvelles aventures qui, à coup sûr, ne manqueront pas d'être palpitantes.
Pour changer, l'excitation est telle ce matin, que je n'ai aucun mal à prendre la route tôt. La veille, après une révision approfondie de la PR7, j'avais préparé avec minutie la navigation du jour et, surtout, les ravitaillements en essence. Je prévois de traverser une partie du désert par la piste et une autre en hors-piste sans trop m'éloigner de la route, comme à mon habitude, histoire de m'immerger dans cet environnement quasi mystique sans prendre trop de risque.
Je quitte Kerman par la quatre voie pour m'en éloigner rapidement.
Arrivent ensuite les premiers contreforts montagneux.
Et les premières pistes bordées de villages entiers en ruine.
La piste est belle et je peux tracer sans risque. Les premières concrétions apparaissent. Je ne sais pas s'il s'agit de roches très friables ou d'une agglomération de sable et d'argile, mais la diversité des sols est très étonnante.
S'en suit quelques oasis plantées de palmiers dont la traversée est bitumée.
Et de nouveau cette terre craquelée parsemée de grosses taches blanches, remontées de sel probablement.
Et le goudron disparait enfin pour de bon. Comme lorsque j'ai traversé le lac salé de Tuz en Turquie, j'ai l'impression de rouler ici sur de la crème brulée, une croute plus ou moins solide au-dessus d'un sable bien mou. J'entends la croute se briser sous le poids de la moto.
Etrange sensation.
Je suis très concentré sur la trajectoire car, s'enliser doit être très facile et, vu la température, dans les 40°C, se désensabler serait nécessairement synonyme de grosse suée !
La navigation est des plus simple, suivre un grand couloir entre deux cordons de dunes ou de montagnes, je ne sais pas trop comment les qualifier. Enfin, cela ne dure pas trop. Rapidement j'arrive à une bifurcation. Osmand me dit de prendre à droite pour traverser le cordon de dunes, mais des traces me laissent supposer que l'on peut continuer et trouver un autre passage.
Il y a bien un petit tas de pneus indiquant la bifurcation.
Ce n'est pas la première fois que je vois ce genre de repère pour changer de direction, comme ici, sur la route entre Nouakchott et Nouadhibou en Mauritanie, où, la carcasse de voiture plantée signifie : quitter le bitume et tracer plein est pour aller vers Atar. Ok, ce n'est marqué nulle part, donc si personne ne vous a rencardé, c'est fichu !
Avant de ma lancer tête baissée dans les dunes, je pars à pieds en reconnaissance. Il y a un premier mur au sol porteur qui ne devrait pas poser de problème, mais une fois en haut la piste serpente sur les dunes et la croute, plus ou moins dure, semble de plus en plus fragile. Résistera-t-elle au poids de la PR7 ? J'hésite. C'est le début de la matinée, j'ai encore beaucoup de route à faire, la chaleur est déjà bien présente et, honnêtement, je n'ai pas envie de me mettre en galère. Je décide donc de tenter la chance en suivant les traces qui vont tout droit.
Je suis aux anges. Il n'y a plus de voyage qui compte, plus de destination, plus de contraintes, plus rien. Juste une nature vierge, ma moto et moi. Sensation indescriptible de rouler là dans une sorte d'état second où le temps semble lui-même être suspendu. Ce sont ces moments de moto que je préfère, et de loin. Depuis que j'y ai gouté pour la première fois dans le Sahel, j'en suis devenu accro, surtout qu'avec les GPS modernes on peut s'y adonner en toute sécurité, ce qui n'étais pas le cas autrefois lorsque nous ne disposions que de cartes papiers imprécises et d'une boussole. Avec le recul et l'âge, je me dis que plus jeune, j'ai eu beaucoup de chance. Mais là, aujourd'hui, je me sens bien et en toute sécurité. Alors j'en profite comme jamais.
Mais toutes les bonnes choses ont une fin. La partie porteuse s'arrête net pour laisser la place à une mer de sable fin.
De part et d'autres, les restes d'une palissade en tronc de palmier, dérisoire rempart à la désertification.
La progression des déserts est une véritable problématique pour beaucoup de pays. Je ne peux m'empêcher de repenser à la ville sainte de Chinguetti, autrefois important centre culturel et commercial, qui est aujourd'hui envahie par les sables du Sahara.
Impossible de m'aventurer là seul à moto, surtout que le vent s'est levé.
Je n'ai pas d'autres choix que de rebrousser chemin un temps. Je découvre alors une sorte de centre de vacances abandonné, une sorte de Club Med en plein désert. Un coin intéressant pour bivouaquer le cas échéant que je note dans mes waypoints.
Je retrouve une piste roulante.
Puis le bitume ce qui me permet d'abattre des kilomètres, car, à vrai dire, pour le moment, je n'ai pas beaucoup avancé. J'ai repéré sur Osmand une station essence où j'avais prévu de faire le plein. Malheureusement, elle a été démantelé et seuls les bâtiments abandonnés subsistes. Cela est problématique car je ne vois rien d'autres dans la région où ravitailler, pas le moindre patelin où je pourrais trouver de l'essence en bouteille. Je prends le temps de boire un coup et de réfléchir. J'estime la distance qui me reste à parcourir, sachant que comme j'ai prévu du hors-piste, je ne sais pas exactement. Cela devrait passer avec l'autonomie de la PR7, si, comme à mon habitude, je reste raisonnable sur la poignée de gaz.
J'arrive dans la région que je voulais traverser avec les premiers Kaluth, ces formations rocheuses au milieu du désert.
Je quitte le bitume et c'est parti ! C'est juste irréel, une sorte de paysage de pythons rocheux dignes d'un western à la Sergio Léon planté en plein désert de sable balayé par les vents. Je navigue à vue, serpentant entre les concrétions rocheuses à la recherche du sol porteur pour éviter de m'enliser tout en essayer de garder le cap donné par Osmand. J'ai surtout l'impression de rouler dans un labyrinthe. Et, tout d'un coup, cela fait tilt dans ma petite tête et je m'arrête d'un coup. Qui dit labyrinthe dit facile de se perdre. Je sors donc mon fil d'Ariane, enfin, la fonction d'Osmand pour enregistrer mon parcours. Si besoin est, je pourrais facilement revenir sur mes pas. Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt? Parfois j'ai vraiment l'impression d'être un sempiternel débutant !
Je repars sans plus attendre et, rapidement, j'ai l'impression de naviguer sur une mer de sable d'où émerge quelques ilots rocheux. C'est juste fou ! Depuis le temps que je roule ma bosse par monts et par vaux, j'ai connu pas mal de terrains différents, mas jamais comme ici. Je suis hors du temps, j'oublie tout et me contente de rouler en vérifiant régulièrement de garder globalement le cap.
C'est là que je me dis que, vu du ciel, ce doit être complètement incroyable. Je n'ai pas de drone mais … je peux monter sur un pic rocheux ! Voilà une bonne idée ou, peut-être pas, mais si je ne teste pas, je ne saurais jamais. Et me voici parti cherchant à grimper sur un point haut comme si je n'avais rien d'autre à faire.
Mais j'ai bien fait car le spectacle est grandiose. Je profite de la vue qui s'offre à moi et je réalise alors que le vent a pas mal forci depuis tout à l'heure et, qu'en bas, la visibilité diminue rapidement. Tout d'un coup je redescends sur terre rattrapé par la réalité.
L'après-midi est bien entamée, le vent se renforce généralement avec la tombée du jour, je suis très limite question essence et je suis au milieu de nulle part en dehors de toute piste ou voie de communication et, qui plus est, sans réseau. S'il m'arrive le moindre problème je ne pourrais espérer l'aide de personne et ma seule option serait alors de déclencher ma balise de détresse, ce que j'aimerai éviter à tout prix. Le bon côté des choses c'est que j'ai suffisamment d'eau et, qu'avec Osmand, je ne suis jamais perdu. Mais si je tombe en panne sèche, je ne serais pas plus avancé pour autant de savoir où je suis !
Il me faut donc faire un choix. Je crois que si mon amis Arnaud était là avec sa 701, je dirais banco. Mais seul, le risque me semble déraisonnable. Je n'ai pas de marge de manœuvre, pas de plan B et les tempêtes de sable, je connais depuis le Sahara et cela ne me tente pas vraiment.
Le choix me semble évident mais j'hésite tellement le moment est incroyable et que j'aimerai le prolonger. Pour me motiver je me persuade que j'ai encore d'innombrables choses à vivre durant ce voyage et qu'il serait complètement stupide de foncer tête baissée dans les problèmes en toute connaissance de cause.
J'affiche donc sur Osmand la trace enregistrée et je rebrousse chemin. Il ne me faut pas longtemps pour oublier ma déception et me concentrer juste sur l'instant présent. J'en profite à me gaver.
J'arrive à la fin de la trace enregistrée. Je vois bien le bitume là, à quelques centaines de mètres, mais je jardine, tourne en rond pour contourner les bancs de sables mous et éviter de m'enliser sans arriver à rejoindre la route. La force du vent augmente rapidement confirmant la justesse de mon choix. Alors, je m'arrête, repère la position de ma moto sur Osmand, et pars en reconnaissance à pieds pour trouver le passage, économisant par la même un peu d'essence qui risque de me faire cruellement défaut. Enfin me voici sur la route. Je remonte chercher ma moto et quelques minutes plus tard, je suis sur le goudron. Heureusement que j'ai eu la présence d'esprit d'enregistrer la trace même un peu tardivement, sinon je serais toujours là-bas à jardiner !
Plus j'avance et plus le vent forci, créant ici et là des congères de sable barrant parfois totalement la route.
C'est ce que je redoute le plus, car je n'oublie pas mon copain Eric qui, sur une toute petite congère sur le goudron entre Nouakchott et Nouadhibou est tombé, avec pour conséquence une grave entorse et rapatriement sanitaire en France. Fini l'aventure pour lui.
Le vent est si violent qu'il créé un brouillard de sable tel que la caméra distingue difficilement le bitume du sable, mais moi, engoncé dans mon casque, je vois moitié moins bien car évidement, impossible de rouler visière ouverte sous peine d'avoir l'impression de passer à la sableuse. C'est peut être une bonne solution pour ressortir avec une peau de bébé, mais simplement invivable là, sur la moto, à cet instant. Parfois je ne me guide qu'avec Osmand roulant tout doucement pour éviter de me planter dans ces congères.
Parfois la visibilité s'améliore un peu alors j'augmente doucement le rythme tout en restant en mode "Emergency", c’est-à-dire que plus rien ne compte à part sortir indemne de cette situation.
Souvent on me demande quelles sont les principales qualités nécessaires pour voyager de la sorte. Mes interlocuteurs s'attendent à ce que je leur parle conduite tout terrain ou mécanique, mais non. Pour moi, voyager, c'est être capable de rouler quel que soit l'état de la route, de la piste et surtout, de la météo. Car c'est dans ces moments-là où, seul au monde, quand les éléments semblent se liguer contre moi qu'il faut avancer coute que coute. Et dans ces là, je serre les fesses avec tous les sens aux aguets pour essayer d'anticiper au mieux la situation. Je vois ma jauge à essence au plus bas et la distance restant à parcourir avant la prochaine ville toujours conséquente. Là, je ne me berce plus d'illusion, c'est sans équivoque, je n'y arriverai pas. Je m'arrête pour verser mes deux litres de réserves dans le réservoir. J'en profite pour chercher sur Osmand un patelin, une maison isolé, un truc même riquiqui, mais peu importe, j'y dénicherai bien de l'essence en bouteille. Je trouve un village, Dehselm, 110 km. Avec un peu de chance, je devrais y arriver avec comme priorité, me mettre à l'abri pour la nuit. Pour l'essence, chaque chose en son temps, je verrais cela demain. Je roule le plus tranquillement possible pour économiser au mieux le précieux carburant. Entre le sable, le vent violent et les différents jardinages de la journée, j'ai consommé plus que la normale. Cela semble néanmoins jouable. En me rapprochant de Dehselm, je commence à croiser quelques véhicules. Je suis grandement soulagé car jusqu'à présent, j'étais plutôt seul au monde !
Plus qu'une quinzaine de kilomètres, j'y crois plus que jamais mais le destin en décide autrement, la moto ratatouille, la panne sèche n'est pas loin. Deux doigts sur l'embrayage prêt à débrayer au moment fatal et, quelques secondes plus tard, me voici en roue libre. Je gare la moto sur le côté gauche de la route pour pouvoir allumer mes phares si j'entends un véhicule arriver et je scrute l'horizon, le casque toujours vissé sur la tête pour me protéger du sable. Je n'attends pas trop longtemps, une camionnette arrive. Je fais des grand gestes et elle s'arrête. J'avais préparé mon petit laïus sur le traducteur de mon téléphone, lui montre, et, après un traditionnel Salam Aleykoum, il me dit juste "no benzine no benzine" et démarre en trombe. Pour une fois que je suis vraiment en détresse, je tombe sur le seul iranien antipathique !
Je ne me décourage pas pour autant et attends. De toute façon, je ne peux rien faire d'autre ! Enfin, une voiture s'arrête, quatre hommes à l'intérieur. Rebelotte, je leur montre mon téléphone et tout de suite ils réagissent. Trois d'entre eux descendent de la voiture, ouvrent le coffre et je comprends au premier coup d'œil. Ils ont une moto pompe et se proposent de me donner l'essence du réservoir. Un litre ferait l'affaire, mais il me baragouine quelque chose tout en mimant.
Bingo, je tilte. Je retourne à ma moto, prends une de mes bouteilles d'eau, mon couteau et sépare le goulot du reste. Je leur tends le cul de la bouteille qu'ils remplissent tant bien que mal. Ensuite, avec le goulot comme entonnoir, l'essence est versée dans mon réservoir. Ils insistent pour me donner tout ce qu'ils ont, environ 3 ou 4 litres à vue de nez. Je les remercie chaleureusement, leur demande combien je dois mais ils refusent évidement quoi que ce soit.
Me voici soulagé, mon principal problème étant résolu. Ne reste plus qu'à trouver un abris pour la nuit, ce qui ne devrait pas être trop difficile vu l'hospitalité des gens.
Je reprends la route, mes bons samaritains poursuivant la leur à contre sens. Plus que quelques kilomètres avant le village quand je vois des phares dans mes rétroviseurs. Je sais que, de l'arrière, je ne suis pas trop visible, alors je suis très attentif, mettant quelques coups de frein pour alerter au mieux de ma présence. Une voiture me double en klaxonnant et, devinez, ce sont mes sauveurs du jour ! Enfin, presque. De quatre ils ne sont plus que deux adultes et un gamin. Cela reste un mystère pour moi vu que je pensais qu'il n'y avait rien ici. Mais peu importe, je comprends vite, ils me font signe de les suivre.
Quelques minutes plus tard nous arrivons au village de Dehselm où je les suis jusqu'au portail d'une concession. Le conducteur descend et déniche une clé de sous une pierre. Ils me font rentrer la PR7 et garent leur voiture un peu plus loin dans la cours.
Je descends de la moto, tombe mon casque et je souffle, soulagé. Je ne sais pas si déjà le vent faibli ou si c'est le mur d'enceinte qui joue son rôle protecteur, mais, à l'instant, je me sens hors de danger et … vidé. Le simple fait d'avoir ôté mon casque et de me savoir en sécurité dissipe instantanément toutes la tension nerveuse de ces dernières heures. Je me sens bien. J'en aurais presque oublié mes hôtes qui viennent me voir. Ils ne parlent pas un mot d'anglais évidemment, il va falloir une fois encore faire confiance au traducteur. Avant d'entrer dans la maison, vu que nous sommes entre hommes, non seulement j'enlève mes bottes comme le veut la coutume, mais aussi ma veste de moto ainsi que mon pantalon. Bien m'en a pris, car sous moi se forme un petit tas de sable. Vu la température, j'avais toutes les écoutilles ouvertes et j'en avais partout, mais vraiment partout. Je me secoue pour éviter d'en tapisser l'intérieurs et passe un pantalon de fine toile avant d'entrer.
Nous nous installons sur les tapis et ils m'offrent le traditionnel thé. La discussion débute, laborieuse, et je finis par comprendre que nous sommes chez le frère d'un des deux hommes. J'apprends que c'est la saison des tempêtes de sable, que le vent forcit en fin d'après-midi pour disparaitre avec le coucher du soleil.
Ils m'assaillent de questions et, pour être tout à fait honnête, à cet instant, je voudrais juste que l'on me fiche la paix pour que je puisse m'assoupir un petit peu. Mais je suis leur invité et j'ai maintenant pour devoir d'assouvir leur curiosité. C'est souvent le pendant de l'hospitalité et il faut l'accepter. Et c'est parti, le sempiternel laïus, d'où je viens, où je vais, quel âge j'ai, ma profession, femme, enfants, veaux, vaches et cochons, tout y passe.
Alors que la discussion bat son plein, je sens comme un malaise que je n'arrive pas à percer. Finalement l'un d'entre eux se lance. Ils n'avaient pas prévu de rester ici et i n'y a rien à manger. Ils semble effondré, limite déshonoré. Je suis soudainement soulagé. Ce n'est pas bien grave, je les rassure car j'ai tout ce qu'il faut. Pour une fois, c'est moi qui invite !
La dernière fois que j'avais invité quelqu'un de la sorte, au milieu de nulle part, c'était Rahel, sur la piste du refuge en Islande. Souvenirs …
Mais je n'ai pas le temps de rêvasser. Je retourne à la moto et vais chercher mon sac spécial bivouac. Je déballe mon barda devant leur air médusé. Le clou du spectacle étant mon réchaud. Ils n'ont pas l'air de me croire quand je leur explique que, même aussi petit, il chauffe du feu de dieu !
Comme une bonne expérience vaut mieux qu'un barbant discours, je leur fait une petite démonstration. Là j'ai définitivement marqué des points. Ils sont juste subjugués par la taille de la mini bouteille de gaz. Je profite de mon avantage et sors le grand jeu, mes repas lyophilisés de grande gastronomie française, rien que cela ! Voyez plutôt, poulet à l'orientale, brandade de morue, raclette et pâtes à la provençale.
Alors que je pensais avoir définitivement remporté la victoire, leur air incrédule me fait soudainement douter. Je ne vais pas me décourager pour autant, j'ouvre un des sachet et leur montre. Ils sentent, enfin, reniflent plus exactement et semblent encore plus dubitatifs. OK, je conçois que, qui n'a jamais vu cela doit bien hésiter à savoir si c'est du lard ou du cochon, et, pour ce qui est du cochon, je ne suis pas au meilleurs endroit.
Qu'à cela ne tienne, je fais bouillir de l'eau et prépare le sachet ouvert. Je remue consciencieusement, laisse imbiber le temps préconisé et voilà, c'est prêt. Je sors mes gamelles, partage le tout et l'offre à mes hôtes.
Ils goutent et là, comment dire, un grand moment de solitude comme diraient mes enfants ! Seul la politesse et leur devoir d'hospitalité les empêchent certainement de tout recracher illico presto. Je dois admettre ma défaite, je n'aurais pas été un grand ambassadeur de la gastronomie française malgré tous les efforts déployés !
Enfin, tout n'est pas perdu, je suis affamé puisque je n'ai rien avalé depuis le petit déjeuner. j'englouti le tout et ma foi, enfin, je les comprends, cela n'a rien d'extraordinaire. Cela a surtout le mérite de fournir les calories nécessaires à défaut d'être gouteux.
Sur le moment je n'y fais pas vraiment attention, mais l'un d'un a sorti son téléphone et passe plusieurs coups de fils, et le ton monte légèrement, enfin non, plutôt autoritaire.
Quelques minutes plus tard, la porte s'ouvre et deux femmes entrent les bras chargés de plats, la mère et la fille à en croire la différence d'âge. L'atmosphère se détend et, un peu plus tard, elles nous servent du ragout de mouton et des galettes de pain. Je dois avouer que c'est bien meilleur, sans l'ombre d'une hésitation ce qui entérine définitivement leur victoire, enfin, celle des femmes pour être tout à fait honnête car eux, comme à l'accoutumé, n'ont pas bougé le petit doigt.
Une fois le festin fini, les femmes débarrassent tout et s'éclipsent, nous laissant entre hommes.
C'est alors qu'ils m'offrent de fumer de l'opium. Ce n'est pas la première fois que l'on me le propose, mais ce n'est pas pour moi. S'ils avaient eu un digestif, cela aurait était avec grand plaisir, mais là, définitivement, sans façon.
La soirée se passe tranquillement et l'heure de dormir arrive. Ils sortent des couvertures et nous nous installons sur les tapis.
Au petit matin le soleil est de retour. Il y a une moto et de l'essence en bidon dans un appentis au fond de la cours. Il m'en propose 4 litres supplémentaires. Je lui paye avec ceux d'hier et un supplément pour le repas. J'en profite pour nettoyer mon filtre à air qui, en une seule journée, c'est bien emplit. Merci la chaussette de protection !
C'est l'heure des embrassades et du départ pour de nouvelles aventures qui, à coup sûr, ne manqueront pas d'être palpitantes.
Hugo99 et L73 aiment ce message
Re: Adventure is going on ...
Wahou !
Top ==> je trouve que c'est du niveau de l'Islande et de Rachel: excellent CR.
Merci encore David pour tous ces récits...
Top ==> je trouve que c'est du niveau de l'Islande et de Rachel: excellent CR.
Merci encore David pour tous ces récits...
L73- Nombre de messages : 80
Age : 56
Localisation : Savoie
Moto : 800GS 2008
Département : Savoie
Date d'inscription : 04/12/2021
Re: Adventure is going on ...
Passionnante cette étape, merci pour le récit et les photos c’est prenant!
Jib53- Nombre de messages : 347
Age : 48
Localisation : Laval
Moto : F800 GS ABS 2011
Département : Mayenne 53
Date d'inscription : 12/09/2020
Re: Adventure is going on ...
et ben ! tu vas en boire des bières !!!
tonton jp- Nombre de messages : 817
Age : 68
Localisation : au pieds du vercors
Moto : f 800 gsa , xcountry
Département : isere
Date d'inscription : 28/07/2013
Re: Adventure is going on ...
J'ai trois mois de retard à rattraper !!!!tonton jp a écrit:et ben ! tu vas en boire des bières !!!
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